Le Comité pour la prévention de la torture (CPT), au centre des réactions en raison de sa responsabilité dans l’isolement absolu du leader kurde Abdullah Öcalan, a répondu pour la première fois aux questions de l’agence de presse ANF. Il a déclaré que l’isolement était inacceptable mais a évité sa propre responsabilité et a laissé deux questions sans réponse.

Le Comité pour la prévention de la torture (CPT), qui a accepté que le blocage continu du droit d’Abdullah Öcalan à visiter sa famille et ses avocats est inacceptable et clairement contraire aux normes internationales, a ignoré sa responsabilité et a choisi de renvoyer la balle à la Turquie.

L’agence ANF a souhaité discuter de l’isolement à Imrali, qui concerne des millions de personnes, en particulier le peuple kurde, avec le CPT, qui est l’interlocuteur de la question et également le centre des critiques.

Sa demande d’entretien en face à face avec Hans Wolff, vice-président du CPT, qui faisait partie de la délégation ayant visité Imrali pour la dernière fois a été rejetée, en disant : « Puisque le rapport sur la dernière visite à Imrali n’a pas encore été publié, une telle réunion ne sera pas possible. »

Suite à l’insistance de l’ANF, le CPT a accepté de répondre aux questions de l’agence de presse Kurde par écrit. Nous publions ici l’intégralité de l’interview réalisée par écrit avec le secrétaire exécutif du CPT, Hugh Chetwynd, ainsi que les questions laissées sans réponse

Le CPT, qui a visité pour la dernière fois la prison d’Imrali en septembre 2022, ne publie-t-il toujours pas son rapport simplement parce qu’il n’a pas obtenu l’approbation de la Turquie ?

La Convention du CPT repose sur les deux piliers de la coopération et de la confidentialité. En conséquence, la Convention permet uniquement au CPT de publier un rapport avec l’autorisation de l’État partie.

2. L’absence de nouvelles des prisonniers d’Imrali a suscité une profonde inquiétude dans l’opinion publique. Le CPT travaille-t-il sur cette question ?

Le Comité est en dialogue constant avec les autorités turques, mais ce dialogue reste confidentiel. Cependant, il est important de souligner que, en 2019 et lors des visites précédentes, la délégation n’a reçu aucune allégation de

mauvais traitements des prisonniers par les gardiens de la prison d’Imrali. Au contraire, tous les prisonniers ont indiqué qu’ils étaient correctement traités par le personnel.

3. Le CPT prévoit-il de visiter à nouveau la prison d’Imrali en cas d’absence de nouvelles ?

Le CPT a visité Imrali 9 fois, chaque fois de manière ad hoc, en 1999, 2001, 2003, 2007, 2010, 2013, 2016, 2019 et 2022. Le CPT peut décider, s’il le juge nécessaire, de réaliser une nouvelle visite sur le site.

4. Les avocats du leader du peuple kurde Abdullah Öcalan et des trois autres prisonniers à Imrali soulignent qu’il n’y a eu aucune communication avec leurs clients depuis plus de trois ans. Le CPT a-t-il connaissance de cet état d’absence totale de communication ? Que fait-il pour y remédier ?

Le CPT suit de très près la situation d’Abdullah Öcalan et des trois autres prisonniers. En plus du dialogue continu avec les autorités nationales, le CPT est également en contact régulier avec les avocats d’Abdullah Öcalan.

5. Les prisonniers d’Imrali sont-ils en isolement absolu ?

Le CPT a souligné dans le rapport de la visite de 2019 que tous les prisonniers étaient détenus en isolement solitaire la plupart du temps (c’est-à-dire 159 heures sur 168 heures par semaine, y compris 24 heures par jour les week-ends). Selon le CPT, un tel état de choses n’est pas acceptable.

6. Comment le CPT, qui lutte contre la torture et les mauvais traitements, considère-t-il que les prisonniers soient privés du droit de rencontrer leurs familles et leurs avocats pendant de longues périodes ? N’est-ce pas une violation de l’Accord ?

La question du contact avec le monde extérieur des prisonniers détenus à la prison d’Imrali a toujours été un sujet de dialogue intense et de longue date entre le CPT et les autorités turques. Le CPT a répété à plusieurs reprises dans son dialogue avec les autorités turques que le refus continu des visites des avocats et des membres de la famille n’est pas acceptable et contrevient clairement à divers instruments et normes internationaux des droits de l’homme.

7. Dans ses rapports précédents, le CPT avait formulé un certain nombre de recommandations aux autorités turques pour améliorer les conditions dans la prison d’Imrali. La Turquie a-t-elle pris en considération ces recommandations du CPT ?

Le CPT demande systématiquement une réponse des autorités nationales de chaque État partie au rapport qu’il leur adresse. Cette réponse doit exposer les mesures prises par le gouvernement pour remédier aux situations soulevées. La réponse du gouvernement turc aux recommandations citées dans le rapport de 2019 peut être consultée sur le site du Comité. Aucune information autre que celle contenue dans la réponse des autorités ne peut être donnée.

Les questions laissées sans réponse

Deux questions sont restées sans réponse. Nous les reproduisons ici pour complétude.

1 Le CPT a récemment fait une déclaration publique contre l’Azerbaïdjan (en vertu de l’article 10(2) de la Convention). Envisage-t-il de faire une telle déclaration à propos de la Turquie également ?

2. Les anciens présidents du CPT, Mauro Palma et Marc Neve, que l’ANF a interviewés auparavant et qui ont visité Imrali de nombreuses fois, ont déclaré qu’Imrali n’était pas un endroit approprié pour une prison et que le CPT devrait être plus actif contre les conditions de détention d’Abdullah Öcalan. Ils ont souligné qu’il pourrait jouer un rôle. Selon le CPT, la prison de l’île d’Imrali est-elle appropriée pour une institution pénitentiaire ? Le CPT envisage-t-il de jouer un rôle plus