Hrant Dink, rédacteur en chef du journal Agos, a été assassiné à Istanbul en plein jour, le 19 janvier 2007, alors qu’il regagnait son bureau.
Voilà 17 ans que l’éminent journaliste arménien Hrant Dink a été assassiné à Istanbul en pleine rue et en plein jour. Rédacteur en chef du journal Agos, il avait longuement écrit et parlé du génocide arménien de 1915. Il était connu pour ses efforts de réconciliation entre Turcs et Arméniens. Au moment de sa mort, il faisait l’objet de poursuites, accusé d’avoir « dénigré l’identité turque ».
Le tueur se serait présenté comme un étudiant de l’université d’Ankara qui souhaitait rencontrer M. Dink. Sa demande ayant été rejetée, il a attendu un moment devant une banque située à côté des bureaux d’Agos. Selon des témoins oculaires, M. Dink a été abattu par un homme âgé de 25 à 30 ans, qui a tiré trois fois à bout portant sur la tête de M. Dink, avant de s’enfuir à pied. Selon la police, l’assassin était un homme âgé de 18 à 19 ans. Deux hommes ont été placés en garde à vue dans les premières heures de l’enquête de police, mais ont été relâchés par la suite.
Le lendemain de l’assassinat, la police a annoncé que le tireur avait été identifié sur des images vidéo recueillies par le réseau de surveillance électronique MOBESE d’Istanbul (plus de 4 000 caméras réparties dans la ville) et par des caméras de sécurité locales. Elle a ensuite diffusé des photos au public en demandant à chaque citoyen de contribuer à l’enquête.
Les agences de presse ont rapporté que le tireur avait été identifié comme étant Ogün Samast, un adolescent né en 1990 et domicilié à Trabzon. Six personnes, dont l’ami de Samast, Yasin Hayal, qui avait participé à un attentat à la bombe contre un restaurant McDonald’s à Trabzon en 2004, ont été arrêtées et emmenées à Istanbul.
Reconnu coupable de meurtre et de détention d’armes par la cour criminelle pour mineurs, Samast a été a été condamné en 2011 à 22 ans et 10 mois de prison. L’année suivante, la cour criminelle a jugé qu’il n’y avait pas eu de conspiration derrière l’assassinat. Yasin Hayal a été condamné à une peine de réclusion à perpétuité pour avoir incité Samast à commettre le meurtre, tandis que deux autres hommes ont été reconnus coupables de complicité et condamnés à 12 ans et 6 mois de prison.
En 2013, un témoin anonyme a informé le parquet de l’implication du JITEM* (Service de Renseignement et d’Antiterrorisme de la Gendarmerie turque) dans le meurtre de Hrant Dink.
Le 12 janvier 2015, des mandats d’arrêt ont été émis à l’encontre de deux officiers de police, faisant d’eux les premiers fonctionnaires arrêtés dans le cadre de l’enquête.
Le tueur libéré en 2023
Le tueur Ogün Samast a été libéré le 15 novembre 2023 pour « bonne conduite ». La nouvelle de sa libération avait suscité de nombreuses réactions d’indignation au sein de l’opposition.
À cette occasion, Tülay Hatimoğulları, coprésidente du HEDEP, aujourd’hui Parti Dem, avait déclaré : “Gültan Kışanak, Selahattin Demirtaş, Osman Kavala, Can Atalay sont en prison juste à cause de leurs opinions, mais Ogün Samast, le meurtrier de Hrant Dink, est libre ! Nous poursuivrons notre lutte contre cette pratique d’exécution discriminatoire des peines ainsi que contre les responsables de l’assassinat de Hrant et le pouvoir politique qui se cache derrière. Nous poursuivrons la lutte pour la paix, que notre bien-aimé Hrant nous a laissée en héritage.”
* Le JITEM (Service de Renseignement et d’Antiterrorisme de la Gendarmerie turque) est une formation créée par l’Etat turc pour lutter contre le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). Cette organisation clandestine est responsable de plus de 1500 disparitions en garde à vue et 5000 exécutions extra-judiciaires, principalement dans les années 90.