Les manifestations entamées la semaine dernière dans la province de Sulaymaniyah, au Sud-Kurdistan (Irak) vont en s’intensifiant. Organisées initialement par des enseignants contre la réduction de 21% de leur salaire, elles ont été rejointes par des milliers de personnes qui sont descendues dans la rue pour dénoncer la corruption et la crise économique.
« Quarante-trois enseignants et civils ont été arrêtés mercredi, le deuxième jour des protestations. Vingt et un d’entre eux ont été libérés », a déclaré Najmadin Muhammed, membre du syndicat des enseignants. Masrour Barzani, Premier ministre du Gouvernement régional du Kurdistan (KRG), a annoncé mercredi matin que les autorités commenceraient à payer les salaires d’octobre dès jeudi. Cela n’a cependant pas empêché les manifestants de Sulaymaniyah de descendre dans la rue pour une nouvelle journée de manifestations.
L’intention des manifestants était d’organiser une manifestation pacifique, « mais les forces de police nous ont empêchés de manifester », a déclaré Najmadin. « Même si nous recevons maintenant notre salaire, nous n’arrêterons pas les protestations, car ils nous doivent encore dix-huit paiements antérieurs », a ajouté l’enseignant.
Shîrîn Emîn, Députée du parti Goran, a été blessée lors des manifestations, par les gaz lacrymogènes lancés par la police ; elle s’est évanouie dans la rue. Elle a déclaré : « Les forces de police ont agi très brutalement avec les manifestants ; en raison de l’utilisation intensive de gaz lacrymogène, je me suis évanouie deux fois. » Et d’ajouter : « Nous ne demandons pas aux autorités des postes politiques ou des fortunes personnelles : nous leur demandons simplement les revenus de base quotidiens de ces pauvres gens afin qu’ils puissent continuer à vivre. »
Mercredi, des manifestations ont eu lieu à Kalar, Darbandikhan et dans d’autres districts de Sulaymaniyah. Les manifestants ont appelé à des mobilisations dans toutes les provinces de la région du Kurdistan. Les autorités, de leur côté, se sont préparées activement à affronter les manifestants. À Hewlêr (Erbil), les forces de police ont installé dès mercredi des points de contrôle temporaires sur la place du marché et dans les rues afin d’empêcher les rassemblements.
« Je suis un travailleur : Je travaille jour et nuit, je n’ai pas d’argent dans ma poche. Je fais partie de la jeune génération et pourtant, je n’ai pas vécu ma jeunesse. Nous avons désespérément besoin de changement », a déclaré un jeune manifestant à Sulaymaniyah.
Le KRG a édicté une mesure interdisant les manifestations. Rebaz Majeed, une jeune photographe local, a parlé au site d’information Medya News : « En prenant des photos des affrontements entre la police et les manifestants, j’ai eu peur que les forces de police ne me confisquent ma carte mémoire et mon appareil photo ». Il a ajouté : « Quand ils ont lancé les gaz lacrymogènes, cela m’a fait mal aux yeux et à la gorge. J’ai été très triste de voir la façon dont la police traitait les personnes qui protestaient pacifiquement pour leurs droits les plus fondamentaux. »
Jeudi, un grand nombre de policiers étaient déployés à tous les coins de rue de Sulaymaniyah, empêchant tout rassemblement de plus de trois personnes, de peur que les protestations ne s’étendent.
« Les protestations doivent mener à une révolution armée, sinon elles ne seront pas efficaces », a déclaré un homme âgé interrogé à Hewlêr par un journaliste d’Esta News. Et d’ajouter : « Il y a eu de nombreuses manifestations pacifiques jusqu’à présent : beaucoup de personnes qui ont participé à ces manifestations ont été tuées. »
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