Les récentes élections parlementaires dans le Sud-Kurdistan (Nord de l'Irak) confirment le statu quo politique, estime l’analyste politique Kamal Chomani, qui dénonce la monopolisation continue du pouvoir par le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l’Union patriotique du Kurdistan (UPK).
Kamal Chomani, analyste politique.

Les récentes élections parlementaires dans le Sud-Kurdistan (Nord de l’Irak) confirment le statu quo politique, estime l’analyste politique Kamal Chomani, qui dénonce la monopolisation continue du pouvoir par le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l’Union patriotique du Kurdistan (UPK).

Dans une interview, Chomani exprime ses préoccupations face aux dysfonctionnements systémiques et aux pratiques autoritaires au sein du paysage politique kurde.

Les retards électoraux révèlent un système en panne

Initialement prévues pour 2022, les élections ont été reportées en raison de blocages politiques qui ont empêché de respecter le calendrier constitutionnel. Selon Chomani, ce report était intentionnel, reflétant les efforts des partis au pouvoir pour masquer leur légitimité vacillante.

Il souligne que les familles dirigeantes, Barzani et Talabani, n’hésitent plus à contourner les processus démocratiques. Sous la pression internationale, le PDK a finalement accepté de tenir les élections, bien que les manipulations pour en influencer les résultats soient restées omniprésentes.

Résultats électoraux : un statu quo consolidé

Les résultats, sans surprise, montrent la domination persistante du PDK dans les régions d’Hewlêr (Erbil) et de Duhok, tandis que l’UPK conserve son influence à Sulaymaniyah et Halabja. Bien que le mouvement Nifşê Nû (Nouvelle Génération) se soit hissé au rang de troisième force politique, Chomani estime que son impact restera limité dans un système verrouillé par les réseaux de clientélisme, les milices et le contrôle des institutions d’État.

Un système électoral sous influence des dynasties et des milices

Chomani dénonce des élections qui sont, selon lui, une simple formalité servant à légitimer la domination continue des dynasties Barzani et Talabani. « Le système est conçu non pas pour permettre un changement, mais pour perpétuer le pouvoir de ces familles », explique-t-il. À ses yeux, tant que l’influence des milices et le contrôle économique exercé par ces familles ne seront pas limités, les élections au Kurdistan resteront une « cérémonie vide de sens ».

Les partis kurdes unis contre Bagdad : un mythe ?

Chomani estime peu probable que les partis politiques du Kurdistan parviennent à former un front uni contre le gouvernement central de Bagdad. Selon lui, le PDK et l’UPK sont plus intéressés par leurs propres intérêts qu’à défendre ceux du peuple kurde.

« Les tensions avec Bagdad sont souvent utilisées par le PDK pour détourner l’attention de ses propres échecs et pour renforcer ses relations exclusives avec la Turquie », explique-t-il.

La montée de la Nouvelle Génération et l’effondrement de Gorran

L’ascension du mouvement Nouvelle Génération et la déchéance de Gorran témoignent de la désillusion croissante du peuple kurde envers l’opposition traditionnelle, note Chomani. Selon lui, bien que la Nouvelle Génération se soit imposée comme troisième force, elle devra faire face aux structures profondément enracinées de domination du PDK et de l’UPK.

« Ce mouvement est largement mené par un homme d’affaires sans idéologie, un populiste qui attaque ses adversaires par des moyens non démocratiques », déplore-t-il, en soulignant le risque que la Nouvelle Génération soit cooptée dans le futur gouvernement pour servir les intérêts du PDK contre l’UPK.

En conclusion, pour Kamal Chomani, le paysage politique au Kurdistan irakien reste dominé par des dynasties puissantes, un système militarisé et un cadre économique verrouillé, limitant toute possibilité de changement significatif via les urnes.