Le HDP a publié un rapport intitulé « L'oppression systématique comme base de la nouvelle Turquie d'Erdogan »
Un rapport de la représentation du HDP en Europe dénonce l'oppression systématique exercée par le régime d'Erdogan

Le HDP a publié un rapport intitulé « L’oppression systématique comme base de la nouvelle Turquie d’Erdogan ».

« La Nouvelle Turquie de Recep Tayyip Erdogan se définit par l’intimidation de l’opposition démocratique, les poursuites contre le Parti démocratique des Peuples (HDP) et l’annihilation des vestiges de la société civile. » C’est ainsi que commence le rapport intitulé « L’oppression systématique comme base de la nouvelle Turquie d’Erdogan » publié par la représentation du HDP en Europe.

Le rapport se poursuit ainsi : « À l’étranger, la ‘Nouvelle Turquie’ se manifeste par le chantage à l’Union européenne, l’intervention dans les pays voisins et l’utilisation d’une agression militaire impitoyable. Un autre aspect de la « Nouvelle Turquie » est que le Parti de la justice et du développement (AKP) d’Erdogan a construit une coalition avec le Parti du mouvement nationaliste (MHP), parti de droite ultra-nationaliste, pour rester au pouvoir.

Le manque de démocratie en Turquie n’est en aucun cas un problème nouveau. Ses causes sont profondément enracinées et remontent à la fondation de l’État. Pourtant, tout au long de l’histoire de la Turquie, la lutte pour une Turquie démocratique n’a jamais cessé, et elle se poursuit encore. Lorsque l’AKP est arrivé au pouvoir en 2002, Erdogan, en tant que président du parti, a déclaré à la fois à la « nation » et à la communauté internationale que l’AKP poursuivrait une politique orientée vers une Turquie stable et démocratique. »

Le rapport ajoute : « Selon cette déclaration, les droits collectifs des personnes non représentées et des femmes, ainsi que les éléments de la société démocratique devaient être garantis dans une nouvelle constitution turque. Et la « politique du zéro problème avec nos voisins » devait être adoptée en réponse aux changements rapides qui submergent le monde. En un mot, Erdogan a fait croire à la communauté nationale et internationale que les problèmes profondément enracinés de la Turquie, y compris la question kurde, seraient résolus dans le cadre de la démocratisation.

Contrairement à cette rhétorique, la démocratie turque, déjà faible, a encore régressé : l’État de droit et les conventions internationales ont été constamment bafoués, et la transparence et la responsabilité ont été mises de côté. Aujourd’hui, l’exercice des droits démocratiques, pourtant inscrits dans la loi, est de facto interdit. Sous son régime autoritaire, Erdoğan proclame « la nouvelle Turquie ». Mais il y a des problèmes structurels et politiques. Il démantèle les derniers vestiges de la démocratie et tente d’éliminer ses opposants par tous les moyens afin d’institutionnaliser son régime. »

« Dans ce cadre, poursuit le rapport, le HDP, deuxième parti d’opposition, fait l’objet de poursuites constantes, et ses membres, députés et co-maires sont illégalement arrêtés et limogés, alors qu’ils agissent dans le respect de la loi. Dans le même temps, la politique étrangère de la « Nouvelle Turquie », qui est présentée comme « préventive plutôt que réactive », consiste à former et à équiper les groupes armés extrémistes – dont l’État islamique (Daesh) – qui ont alimenté les guerres en Irak, en Syrie, en Libye et dans le Haut-Karabakh. Dans la « Nouvelle Turquie » d’aujourd’hui, la justice sociale, la paix et le développement démocratique de la République ne sont plus d’actualité. La détérioration de la situation met également en péril les espoirs de paix et de prospérité dans le Moyen-Orient élargi. »

Les maires élus remplacés par des administrateurs nommés par le gouvernement

À la suite des élections locales du 31 mars 2019, Erdogan a remplacé les représentants élus de 49 des 65 municipalités du HDP par des administrateurs nommés par le gouvernement. Ces municipalités comprenaient trois villes métropolitaines, cinq chefs-lieux de province et 33 districts.  37 co-maires, dont 19 femmes, ont été emprisonnés. Au 31 mars, 15 co-maires, dont 7 sont des femmes, sont toujours en détention. 6 autres co-maires sont assignés à résidence.

Le rapport du HDP indique : « L’un des résultats de la coalition entre l’AKP et le MHP est que la politique contre les Kurdes et les autres groupes religieux et ethniques est devenue de plus en plus agressive. Pour garder le pouvoir même en cas de crise économique, le gouvernement et son partenaire de coalition, le MHP (avec qui il a créé le système présidentiel de type turc), ont mis en avant la guerre en Syrie et en Irak et mené une politique d’anéantissement contre les Kurdes en Turquie, en Syrie et en Irak. En conséquence, le processus de paix initié par Abdullah Öcalan depuis la prison d’Imrali est arrêté depuis 2015. Tant que la voie du dialogue pour la paix sera fermée, la violence se poursuivra. La stratégie politique du gouvernement d’Erdogan est basée sur l’autoritarisme, une interprétation féodale de l’islam, des coalitions avec des nationalistes et des djihadistes radicaux, la violence, la guerre et l’oppression. Tout cela mène à une impasse. »

Le rapport se termine par les remarques suivantes : « La Turquie s’est éloignée de la démocratie et a plongé dans l’autoritarisme. L’appareil d’État et les institutions sont reconfigurés pour contrôler les mécanismes de l’État. La tâche principale de l’État reconfiguré est devenue la suppression de l’organisation démocratique afin de faire de la place au régime autoritaire. La régression démocratique est observée dans tous les domaines de la vie, ce qui porte préjudice à la société sur le plan économique et moral.

Le HDP joue un rôle crucial pour garantir les droits démocratiques du peuple kurde, pour construire la paix et pour faire avancer la démocratisation de la Turquie. Les réalisations politiques que le HDP a réussi à obtenir grâce à la faible démocratie turque peuvent également aider d’autres communautés à travailler ensemble pour la coexistence et la démocratie. Mais si l’on permet à la démocratie turque de régresser davantage, cela aura de graves conséquences, non seulement au niveau régional mais aussi international. Si l’on veut renforcer la démocratie, il faut inciter le gouvernement turc à accepter le rôle important du HDP.

Nous demandons aux organisations internationales – les Nations unies, le Conseil de l’Europe, l’Union européenne – et aux gouvernements européens de maintenir la pression politique nécessaire sur le gouvernement turc afin qu’il s’engage à respecter les conventions relatives aux droits humains et le droit international. Chaque fois que la « nouvelle Turquie » d’Erdogan est acceptée au niveau international comme un partenaire « légitime », les guerres, la violence, les occupations, l’oppression, la persécution et l’emprisonnement sont normalisés. Ces actes ne doivent pas être normalisés. »