Le procès de 18 journalistes kurdes, dont 15 sont détenus, se poursuit aujourd'hui à Diyarbakir, pour le deuxième jour consécutif.
Photos des journalistes kurdes jugés depuis le 11 juillet par la cour criminelle de Diyarbakir

Le procès de 18 journalistes kurdes, dont 15 sont détenus, se poursuit aujourd’hui à Diyarbakir, pour le deuxième jour consécutif.

L’audience du procès contre 18 journalistes kurdes poursuivis pour « appartenance à une organisation terroriste » a commencé hier, mardi 11 juillet, devant la Cour criminelle de Diyarbakir. 15 d’entre eux sont derrière les barreaux depuis plus d’un an. La journée d’hier a commencé par les auditions des journalistes Ömer Çelik, Mehmet Ali Ertaş, Serdar Altan, Mehmet Şahin et Zeynel Abidin Bulut, qui se sont tous exprimé en kurde. 

Après la lecture du résumé de l’acte d’accusation, Serdar Altan, co-président de l’Association des journalistes Dicle Fırat (DFG), s’est exprimé pendant 45 minutes. Après avoir relaté l’histoire de la répression contre la presse kurde depuis la fin de l’empire ottoman, le journaliste a rappelé que les personnes jugées dans le cadre du présent procès avaient été arrêtées le 8 juin 2022, soit le jour anniversaire de l’assassinat du journaliste kurde Hafiz Akdemir, tué par le Hezbollah en 1992. 

Devant le tribunal pour demander des comptes

Et Serdar Altan de s’indigner devant les juges: « Nous sommes devant ce tribunal non pas pour rendre des comptes, mais pour vous demander des comptes. Pourquoi nous avoir privé de notre liberté et nous avoir éloignés de nos proches et de notre métier durant ces treize mois? »

Zeynel Abidin Bulut, collaborateur du journal en langue kurde Xwebûn, a rappelé quant à lui que, sans le travail des journalistes kurdes, beaucoup de massacres seraient restés dans l’ombre, citant notamment les meurtres de Ceylan Önkol et d’Ugur Kaymaz, ainsi que le massacre de Roboski. « Tous ces crimes ont été dévoilés par les journalistes kurdes, et c’est précisément ce qui dérange le gouvernement et l’État », a déclaré Bulut devant la cour.

Journalistes retenus en otages

Mehmet Ali Ertaş, rédacteur en chef du quotidien Xwebûn, s’est insurgé à son tour contre le procès fait aux journalistes kurdes : « Nous sommes ici aujourd’hui à cause des programmes d’information que nous avons réalisés en kurde. Il existe un seul journal en kurde et il est jugé ici aujourd’hui. Ce sont donc les valeurs du peuple kurde qui sont jugées ici. »

Plusieurs représentants d’associations et de syndicats de journalistes ont assisté à l’audience mardi. L’association des journalistes Dicle Fırat (DFG) et la plateforme des femmes journalistes de Mésopotamie (MKGP) ont tenu une conférence de presse le même jour, devant le palais de justice de Diyarbakir, pour dénoncer la répression accrue exercée à l’encontre des journalistes sous le régime AKP de Recep Tayyip Erdogan. Les intervenants ont notamment accusé les autorités turques de retenir les journalistes en otages afin de les empêcher des couvrir des sujets sensibles tels que les élections.

L’audience a repris ce matin, avec l’audition d’Aziz Oruç, rédacteur en chef de l’Agence de presse Mezopotamya (MA). « On nous dit que nous sommes des terroristes et non des journalistes. Nous payons pour avoir convenablement exercé notre métier et pour avoir servi le journalisme », a déclaré le journaliste kurde qui avait déjà été condamné à la prison dans le cadre d’une autre procédure.