Le 17e rapport annuel sur la peine de mort en Iran révèle une escalade effroyable du recours à la peine de mort par le régime iranien en 2024
Au moins deux manifestants du mouvement Jin Jiyan Azadî (Femme Vie Liberté) figurent parmi les personnes exécutées en Iran en 2024

Le 17e rapport annuel sur la peine de mort en Iran révèle une escalade effroyable du recours à la peine de mort par la République islamique en 2024. L’année a été marquée par au moins 975 exécutions, soit une augmentation de 17 % par rapport aux 834 enregistrées en 2023.

Le 17e rapport annuel sur la peine de mort en Iran, publié par les ONG Iran Human Rights (IHR) et Ensemble contre la peine de mort (ECPM), fournit une évaluation et une analyse des tendances de la peine de mort en 2024 en République islamique d’Iran. Il présente le nombre d’exécutions en 2024, la tendance par rapport aux années précédentes, le cadre législatif et les procédures, les chefs d’accusation, la répartition géographique et une ventilation mensuelle des exécutions. 

Le rapport révèle une escalade effrayante du recours à la peine de mort par la République islamique en 2024. L’année a été marquée par au moins 975 exécutions, soit une augmentation de 17 % par rapport aux 834 enregistrées en 2023. Il s’agit du nombre le plus élevé d’exécutions enregistrées en Iran depuis plus de deux décennies, avec une hausse particulièrement marquée observée après l’élection présidentielle et la nomination de Masoud Pezeshkian au second semestre de l’année, dans un contexte de tensions croissantes entre l’Iran et Israël.

Commentant le rapport, le directeur d’IHR, Mahmood Amiry-Moghaddam, a déclaré : « Alors que l’attention du monde était concentrée sur l’escalade des tensions entre l’Iran et Israël, la République islamique a profité de l’absence de surveillance internationale pour terroriser son propre peuple, en procédant à 5 ou 6 exécutions par jour. Les Iraniens qui réclament leurs droits fondamentaux constituent la plus grande menace pour le régime, et la peine de mort reste son outil de répression politique le plus puissant. Ces exécutions s’inscrivent dans la guerre que la République islamique mène contre son propre peuple pour conserver son emprise sur le pouvoir. »

Seules 95 exécutions (moins de 10 %) ont été officiellement annoncées, soit une baisse significative par rapport aux 15 % révélés en 2023. Malgré les appels répétés de la communauté internationale, ce manque de transparence délibéré non seulement nuit à la responsabilisation, mais dissimule également l’ampleur réelle du recours à la peine de mort par l’État.

L’année a également vu le plus grand nombre d’exécutions de qisas (talion) enregistrées en plus de deux décennies, avec au moins 419 personnes exécutées pour meurtre. Le rapport cite le cas d’Abbas Karimi, père de deux enfants, qui a été pendu parce que sa famille n’avait pas les moyens de payer la diya (prix du sang), qui s’élève à plus d’un million d’euros. Autre exemple poignant, celui d’Ahmad Alizadeh, qui a été pendu pendant 28 secondes, puis réanimé à la demande du plaignant, avant d’être exécuté à nouveau quelques semaines plus tard.

Les autorités iraniennes ont poursuivi leur répression de la dissidence politique, exécutant au moins dix personnes affiliées à des groupes d’opposition interdits, dont neuf prisonniers politiques kurdes et un prisonnier politique et double national enlevé dans un pays voisin. Tous ont été condamnés à mort après des simulacres de procès par les tribunaux révolutionnaires. Mohammad Ghobadlu et Reza Rasayi, deux manifestants du mouvement « Femme, Vie, Liberté » (Jin Jiyan Azadî), ont été exécutés pour meurtre. Reza Rasayi, un manifestant kurde de confession yézidie, a été condamné à mort sur la base d’aveux obtenus sous la torture et de l’elme-qazi (connaissance du juge). D’autres manifestants du mouvement « Femme, Vie, Liberté » se trouvent actuellement dans les couloirs de la mort. 

L’exécution de femmes a atteint un seuil inquiétant, avec au moins 31 femmes mises à mort, le nombre le plus élevé depuis que IHR a commencé à surveiller les exécutions en 2007. Les lois discriminatoires et les facteurs sociétaux contribuent à la vulnérabilité des femmes dans les cas de peine de mort.

La forte augmentation des exécutions en 2024 met en évidence le recours croissant de la République islamique à la peine de mort pour faire taire la dissidence et maintenir le contrôle. « Avec plus de 8 800 exécutions depuis 2010, les autorités persistent à utiliser la peine de mort comme un instrument clé d’oppression pour conserver leur emprise sur le pouvoir », dénonce le rapport

En mars 2025, lors de la 58e session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, la Mission Internationale Indépendante d’Établissement des Faits sur la République Islamique d’Iran (FFMI) présentera son rapport final sur les atrocités commises par la République islamique depuis le début des manifestations nationales « Femme, vie, liberté ». La création de la FFMI par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a constitué une étape importante de la part de la communauté internationale pour tenir les autorités iraniennes responsables des graves violations des droits de l’homme, y compris l’exécution de manifestants. 

« L’impunité et l’absence de responsabilité sont parmi les obstacles les plus importants à l’amélioration de la situation des droits humains en Iran. Compte tenu de l’ampleur des violations des droits de l’homme en Iran, y compris le recours systématique à la peine de mort comme outil de répression, un mécanisme international de responsabilisation plus permanent sera essentiel dans les années à venir pour tenir la République islamique responsable de ses crimes », souligne le rapport.

Les deux ONG appellent les organisations internationales et les gouvernements ayant des relations diplomatiques avec l’Iran, à faire de la peine de mort une priorité dans leurs rapports avec les autorités iraniennes. « Une pression internationale constante est essentielle pour augmenter le coût politique des exécutions et freiner la machine à tuer de la République islamique », conclut le rapport.