Trois ans après la libération de Raqqa

Il y a trois ans, l’ancienne capitale de l’État islamique (EI) Raqqa, a été libérée par les Forces démocratiques syriennes (FDS) des groupes djihadistes. La ville, située à environ 200 kilomètres à l’ouest d’Alep, a depuis été reconstruite. Les trois dernières années de règne de la terreur ont laissé des traces profondes.

Après l’occupation de la ville irakienne de Mossoul par l’organisation djihadistes EI en 2014, les djihadistes ont avancé sur Raqqa, l’une des plus grandes villes de Syrie, avec les armes qui y ont été capturées à Mossoul. Le groupe Al-Qaida Jabhat al-Nusra et la soi-disant Armée syrienne libre (ASL) ont abandonné la ville. Un peu plus tard, Raqqa a été nommée capitale du « califat de l’EI » et a été couverte d’un règne de terreur orienté sur l’interprétation salafiste de la charia. Après Raqqa, l’EI a progressivement pris le contrôle de nombreuses autres villes du nord de la Syrie et a tourné son attention vers Kobanê en septembre 2014. Les djihadistes ont attaqué la ville sur trois fronts mais ont rencontré une résistance sans précédente. À Kobanê, les Kurdes ont fait subir la toute première défaite à l’EI qui jusque-là terrorisait le monde entier.

Le 6 juin 2017, les Forces démocratiques syriennes (FDS) ont lancé une offensive pour libérer Raqqa et, après cinq mois de combats acharnés, y ont mis fin le 17 octobre. La déclaration de la libération de la ville a été faite par les Unités de défense des femmes (YPJ), qui combattaient en première ligne contre l’EI. La déclaration a été annoncée au monde entier sur la place Al-Naim, où l’État islamique avait procédé à des exécutions publiques.

L’administration de la ville libérée de Raqqa, a été remise peu de temps après à un conseil civil déjà fondé en avril à Ain Issa. Une grande partie de la ville avait été détruite par l’EI et pendant l’offensive de libération. La reconstruction a surtout été entravée par les pièges laissés par l’EI. A cette même période, des cellules dormantes de l’EI ont continué à mener des attaques sanglantes. Aujourd’hui, grâce à des dispositifs de sécurité, la ville est relativement calme et stable. Mahmut al-Said, membre de la sécurité intérieure, souligne que ce processus a été très difficile : « Tout d’abord, les mines et les engins explosifs ont été enlevés. Ensuite, les cellules dormantes de l’EI et celui des services de renseignement turcs ont été poursuivis ».

Les tribus arabes de la région ont joué un rôle important dans la reconstruction sociale par le conseil civil. Avec le début de l’invasion turque en octobre 2019 à Serêkaniyê (Ras al-Ain) et Girê Spî (Tal Abyad), des cellules qui avaient continué à exister à Raqqa ont également été réactivées. Certaines d’entre elles appartenaient à l’EI, tandis que d’autres étaient sous le contrôle de l’État turc et des djihadistes qu’il recrutait. Le 22 octobre 2019, des unités armées du gouvernement syrien ont été stationnées à la frontière turque suite à un accord entre la Russie et la Turquie. Après cela, les forces du régime d’Assad sont également devenues actives dans la région.

L’objectif commun de ces cellules, commandées depuis différents centres, est de déstabilisé la sécurité et la stabilité dans la région. À cette fin, des attaques ont été menées à Raqqa contre des membres du conseil civil, des politiciens et des chefs de tribu arabes.

Nur al-Zib, co-président du Conseil civil de Raqqa, souligne qu’après l’annonce du retrait des troupes américaines du nord et de l’est de la Syrie, de nombreuses forces pensaient que le système qui avait été laborieusement mis en place dans la ville allait s’effondrer. Il a même été affirmé que le Conseil civil remettrait la direction de la ville à Damas. « Grâce à la cohésion de la population et des tribus et au rejet de toute ingérence extérieure, le Conseil civil a pu rester en place avec succès », explique le co-président. La solidarité sociale a fait échouer la tentative d’attiser les conflits entre les groupes de population, dit-il et ajoute : « A travers les cellules du régime syrien, les personnes proches de l’administration autonome ont été attaquées à plusieurs reprises. Des tentatives ont été faites pour créer le chaos dans la région. Cependant, la population a agi avec prudence et ces tentatives n’ont donc pas abouti ».