Leyla Güven, Coprésidente du Congrès pour une Société démocratique (DTK) et ancienne députée du Parti démocratique des Peuples (HDP).

Leyla Güven a été incarcérée dans une prison de haute sécurité de la province d’Elazığ, a annoncé sa fille, la journaliste Sabiha Temizkan, mardi soir, sur son compte Twitter. Aucune information n’a été communiquée, ni à ses proches ni à ses avocats, concernant le transfert de Mme Guven qui, arrêtée lundi soir, avait été envoyée dans la maison d’arrêt de Diyarbakir dans un premier temps. Les avocats de l’ex-députée kurde ont eu connaissance de ce transfert lors d’une tentative de visite à leur cliente mardi après-midi. 

Condamnée par un tribunal turc à 22 ans et 3 mois de prison pour « terrorisme », lundi 21 décembre, Mme Güven a été arrêtée le soir-même à Diyarbakir, alors qu’elle se trouvait chez Semra Güzel, députée du Parti démocratique des Peuples (HDP). La politicienne de 56 ans a d’abord été emmenée au Département de lutte contre le terrorisme où elle a été contrainte de passer la nuit. Ce n’est que mardi matin qu’elle a été transférée au tribunal pour la lecture du verdict, avant d’être envoyée au centre pénitentiaire pour femmes de Diyarbakir. Les raisons du transfert de Güven à Elazığ sont encore obscures. Meral Danış Beştaş, avocate et vice-présidente du groupe parlementaire du HDP, a dénoncé la mise en œuvre d’une politique d’éloignement et de dispersion, soulignant le caractère manifestement arbitraire de ce transfert.

La méthode de dispersion comme instrument de double peine

Bien que la loi prescrive l’exécution de la peine d’emprisonnement à proximité du domicile de la personne condamnée, les autorités pénitentiaires turques n’hésitent pas à recourir à la méthode de « dispersion » qui consiste à transférer les prisonniers dans des prisons éloignées afin de les isoler de leur environnement social et de punir leurs proches en les obligeant à parcourir de longues distances.  Les prisonniers concernés sont la plupart du temps des prisonniers politiques. 

Ce n’est pas la première fois que la politicienne kurde chevronnée est arrêtée. En 2009, alors qu’elle était maire de Viransehir, dans la province d’Urfa, et membre du Congrès des Pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, elle a été arrêtée et détenue pendant 5 ans, dans le cadre des “opérations KCK”.

En janvier 2018, elle a de nouveau été placée en détention, cette fois-ci pour avoir dénoncé et critiqué l’opération d’invasion lancée en janvier 2018 par le régime d’Erdogan contre la ville kurde d’Afrin, au nord de la Syrie. Durant cette détention, Guven a entamé une grève de la faim en novembre 2018, qui a duré 200 jours, pour demander la fin de l’isolement carcéral du fondateur du PKK, Abdullah Öcalan, emprisonné sur l’île-prison d’Imrali depuis 1999. Le mouvement qu’elle a lancé a été rejoint par près de 7 000 personnes, principalement des prisonniers politiques. 

En juin dernier, Mme Güven a été arrêtée à nouveau, quelques heures après que le Parlement d’Ankara ait révoqué son mandat de députée. Elle a été libérée après trois jours de garde à vue.