Suite à l'aveu d’un officier de l’armée turque sur le meurtre de trois femmes kurdes à Paris, un spécialiste du renseignement a estimé que la France pouvait punir le terrorisme d'État turc.
Erich Schmidt-Eenboom, journaliste et chercheur allemand spécialiste du renseignement

Commentant les propos d’Ismail Hakkı Pekin, haut-fonctionnaire de l’armée turque, sur le meurtre par la Turquie de trois femmes kurdes à Paris, Erich Schmidt-Eenboom, journaliste et chercheur spécialisé dans le renseignement, a déclaré : « Après cette confession, la France peut punir le terrorisme d’État turc. »

Dans une émission diffusée en direct sur la chaîne de télévision CNN Türk le 16 février 2021, Ismail Hakkı Pekin, ancien chef du département des renseignements généraux de l’armée turque, a pris pour cible les cadres de l’Union des Communautés du Kurdistan (KCK), déclarant qu’ils devaient être visés en Irak, en Syrie et en Europe. « Ils ont aussi leurs éléments en Europe, a-t-il dit. Nous devons faire quelque chose dans ce sens en Europe. Cela a déjà été fait à Paris… » 

L’agence de presse kurde Firat News (ANF) s’est entretenue avec Erich Schmidt-Eenboom, spécialiste des services de renseignement allemands, concernant les déclarations de Pekin qui contiennent une reconnaissance de la responsabilité de la Turquie dans l’assassinat en janvier 2013 de trois militantes kurdes : Sakine Cansiz, fondatrice du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), Fidan Dogan, représentante du Congrès national du Kurdistan (KNK) à Paris, et Leyla Saylemez, membre du mouvement de jeunesse kurde.

Eenboom, connu pour ses recherches sur le triple assassinat de Paris et les activités des services de renseignement turcs (MIT) en Allemagne et en Europe, a attiré l’attention sur le fait que les déclarations de l’ancien fonctionnaire turc concernant les assassinats de Paris pourraient avoir un impact sur le processus judiciaire en France.

Décrivant le meurtre des trois militantes kurdes comme du « terrorisme d’État », l’expert des services de renseignement allemands a dit : « Si la France ne veut pas laisser le terrorisme d’État de la Turquie impuni, elle pourrait faire quelque chose après les paroles de Pekin. »

Eenboom avait défendu la thèse selon laquelle les crimes, tels que ceux de Paris, ne peuvent se produire en Allemagne. Interrogé sur la question de savoir s’il pensait toujours ainsi après les propos de Pekin suggérant de prendre pour cible les politiciens kurdes vivant en Europe, il a répondu : « Je pense que l’Allemagne n’a pas à craindre cela. Je défends toujours ma thèse selon laquelle le MIT ne peut pas commettre de meurtres en Allemagne. Je pense que le gouvernement allemand a pris des mesures adéquates, comme d’autres partenaires européens, pour assurer la surveillance des agents des services de renseignement turcs et les expulser éventuellement s’ils le jugent nécessaire. En d’autres termes, l’Allemagne leur souffle dans le cou et cela est dissuasif. »

Erich Schmidt-Eenboom, qui dirige l’Institut de recherche sur les politiques de paix, avait par ailleurs estimé « crédibles » les informations données par les deux agents du MIT prisonniers du PKK – Erhan Pekçetin et Aydın Güney -, concernant le massacre de Paris.