Première journaliste à couvrir l'affaire de la mort de Jina Mahsa Amini, Nilufar Hamedi a été arrêtée et incarcérée en Iran
Nilufar Hamedi, journaliste emprisonnée à Téhéran pour avoir communiqué sur la mort de Jîna Mahsa Amini

Parce qu’elle a été la première journaliste à couvrir l’affaire de la mort de Jina Mahsa Amini, jeune femme kurde tuée par la police des mœurs, Nilufar Hamedi a été arrêtée et incarcérée par les autorités iraniennes. Une autre reporter et une photographe ont également été arrêtées.

La journaliste Nilufar Hamedi a été placée en détention dans la capitale iranienne, Téhéran. Elle avait été la première à rendre publique l’affaire de Jîna Mahsa Amini, jeune femme kurde de 22 ans, morte le 16 septembre suite à une garde à vue par la police des moeurs. La mort de Jîna a été le point de départ des manifestations qui font rage en Iran depuis plus d’une semaine, en particulier au Kurdistan oriental (Rojhilat), où presque toutes les villes sont en résistance contre la police des mœurs et le régime du président iranien Ebrahim Raisi.

Jeudi, la police iranienne a fait irruption dans l’appartement de Mme Hamedi et saisi son matériel professionnel avant de la placer en garde à vue. La journaliste, qui travaille pour le journal réformateur « Shargh », s’était rendue à l’hôpital où Jîna est décédée et avait contribué à rendre l’affaire publique. Hamedi a ensuite été incarcérée dans la tristement célèbre prison d’Evin, à Téhéran. Au moins deux autres journalistes ont été arrêtées le même jour : la reporter Fatemeh Rajabi et la photographe Yalda Meiri.

Des manifestations férocement réprimées par la régime des Mollahs

Jîna Amini avait été arrêtée mardi dernier, lors d’une visite familiale à Téhéran, pour port « incorrect » du hijab. Torturée lors de l’interrogatoire par la police des moeurs, elle est tombée dans le coma. La jeune femme était déjà en état de mort cérébrale lorsqu’elle a été admise à l’hôpital quelques heures plus tard. Sa mort survenue après trois jours de coma, a été le point de départ d’une vague massive de protestations qui a déferlé sur le pays sous le slogan kurde « Jin, Jiyan, Azadî » [Femme, Vie, Liberté], des manifestations férocement réprimées par le régime des Mollahs.

IHR : 36 morts en Iran et au Kurdistan oriental.

L’organisation kurde de défense des droits humains Hengaw a fait état, jeudi soir, d’au moins 15 personnes tuées et plus de 730 blessées dans les manifestations. L’ONG a indiqué par ailleurs que quelque 600 personnes, dont de nombreux activistes de la société civile kurde, avaient été arrêtées. Dans de nombreux cas, on ignore où se trouvent les personnes arrêtées, a-t-elle précisé. Vendredi, l’organisation Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, a parlé de 36 morts.

CFWIJ : Libérez tous les journalistes !

L’organisation Coalition for Women in Journalism (CFWIJ) et le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), basé à New York, ont condamné la chasse aux professionnels des médias et appelé les dirigeants politiques de Téhéran à libérer immédiatement tous leurs collègues arrêtés pour avoir communiqué  sur l’affaire Amini.

Le régime annonce un durcissement de la répression

Les forces armées iraniennes, quant à elles, ont lancé vendredi un avertissement sévère contre tout trouble à la sécurité dans le pays, a rapporté vendredi l’agence de presse iranienne Isna. « Nous ne laisserons pas les ennemis profiter de la situation », déclare l’armée. Le service du renseignement iranien a également mis en garde contre la participation à des « rassemblements illégaux », selon l’agence Tasnim. Jeudi, le chef du système judiciaire iranien, Gholamhussein Mohseni-Ejehi, a ordonné aux forces de sécurité de réprimer les manifestations dans tout le pays.