La première conférence internationale des femmes « Revolution in the Making », qui s’est tenue à Francfort les 6 et 7 octobre, a indubitablement marqué une nouvelle étape en avant dans la construction d’un réseau international de femmes.

Voir se rassembler plus de 500 femmes de tous âges, venues de tous les coins du monde, n’est pas quelque chose de commun. La conférence a montré que
quand une idée est forte, la participation est garantie.
Le mouvement des femmes kurdes doit être remercié non seulement pour l’énorme effort d’organisation qu’il a fait pour assurer le succès de la conférence, mais aussi et par dessus tout, pour avoir fourni les outils
(offerts par la jineolojî) et le matériel de travail qui a permis d’unir ces centaines de femmes, leur donnant espoir et motivation.

La résolution de la conférence a reflété les visions
plurielles qui ont émergé lors de ces deux journées de discussion. Le message est clair : « Nous allons prendre ce qui nous appartient : notre pouvoir et notre liberté. » et « Nous le ferons en dépit de l’extrême brutalité à laquelle le patriarcat nous confronte. »

En voici le texte complet :

Résolution finale de la 1ère Conférence Internationale des Femmes « Revolution in the Making » – « Révolution en cours »

Nous sommes conscientes du fait qu’une guerre globale contre les femmes est menée par le patriarcat. Nous sommes en lutte depuis des milliers d’années contre le patriarcat sous différentes formes. Cette nouvelle vague de la guerre globale contre les femmes est dirigée contre
nous à cause de ce que nous avons déjà accompli et du fait que nous 
développons toujours plus de moyens d’imaginer et de réaliser une vie égale et libre, dans toutes les parties du monde.

Sachez cela! Nous allons prendre ce qui nous appartient: notre pouvoir et notre liberté. Nous le ferons malgré l’extrême brutalité à laquelle le patriarcat nous confronte.

La guerre globale contre les femmes revêt de nombreuses facettes. Le racisme, la colonisation, le
capitalisme et le patriarcat s’allient de différentes manières; ils se cristallisent parfois en figures comme Erdoğan, Duterte, Mondi, Poutine et Trump, ouvertement misogynes et racistes, mobilisant le patriarcat pour monopoliser le pouvoir et détruisant l’environnement pour enrichir quelques-uns.

Alors, il y a des cartels dans des endroits comme le Salvador, le Guatemala, le Honduras et puis des seigneurs de guerre en Afghanistan. Il y a des tribunaux d’État iraniens qui appliquent la peine capitale aux femmes. Des patrouilles aux frontières sont organisées en Europe et aux États-Unis. Il y a du trafic sexuel, en Europe comme en Afrique.

Il y a le groupe État islamique et d’autres organisations djihadistes patriarcales au Moyen-Orient, des capitalistes exploitant le travail des femmes et des mercenaires qui les enlèvent et les violent partout dans le monde. Il y a des soi-disant crimes d’honneur et crimes de passion, des mutilations génitales et des viols; et toutes les manières dont les femmes sont blessées, violées et tuées par leurs partenaires intimes. Puis, il y a les États et les tribunaux, qui protègent les auteurs et punissent les femmes.

Plus important encore, beaucoup plus important, il y a les femmes. Des défenseuses des droits humains, des féministes, des combattantes, des politiciennes, des militantes…

Il y a des femmes qui tentent coûte que coûte de garder leurs enfants en vie au Yémen, qui résistent et luttent contre l’extrémisme et la dictature en Égypte, qui survivent et aident d’autres à survivre contre le viol et les enlèvements parmi les communautés Ezidies, qui tentent dans les Balkans de ramener la paix dans leur société et dans le monde, et des femmes qui s’organisent et se syndiquent en Argentine.

Il y a des femmes réfugiées de Syrie, de Libye, d’Amérique centrale et d’Afrique de l’Ouest qui tentent de mettre elles-mêmes et leurs familles en sécurité.
Il y a aussi les femmes zapatistes qui luttent et construisent à tout prix, et puis il y a les femmes qui font une révolution au Rojava et imaginent un monde différent. De toutes ces différentes manières nous
tissons ensemble notre avenir.

Il y a celles qui disent Black Lives Matter et Me Too, celles qui disent que nous ne serons pas une de moins, qui disent non à l’interdiction de l’avortement et que vous ne serez pas seules. Il y a celles qui disent que ça aurait pu être toi.

Maintenant, le moment est venu de comprendre, d’évaluer, de ressentir et de soutenir toutes les différentes luttes. Et surtout, il est important de prendre part à ces luttes!

Au cours des deux derniers jours, plus de 500 femmes du monde entier se sont réunies à Francfort pour discuter de la manière dont nous devrions tisser l’avenir et contribuer à la révolution des femmes en cours, et
comme cela a été proposé dans cette conférence par nombre d’entre-nous, nous devons organiser, relier et mettre en réseau nos organisations. Et comme l’a proposé une autre, nous devons commencer à construire le Confédéralisme Démocratique mondial des femmes. Que cette conférence et ce réseau deviennent un premier pas dans cette direction.

À l’issue de cette conférence, nous déclarons que nous poursuivrons notre combat ensemble pour la liberté de chacune d’entre nous. Nous ne permettrons qu’aucune femme ne soit blessée. Nous allons gagner notre
combat contre le patriarcat. Nous allons créer les nouvelles institutions d’une société nouvelle et libre.

Nous déclarons qu’une révolution est en train de se construire (is in the making), que la récente crise du capitalisme est le résultat de nos luttes et qu’aujourd’hui – le présent – nous offre l’occasion historique de transformer ce siècle, le XXIème, en siècle des femmes et des peuples.

Comme l’une des intervenantes l’a exprimé, nous, en tant que Jin (« femme » en kurde), voulons notre Jiyan (« vie » en kurde), basée sur notre Azadi (« liberté » en kurde).

Alors, maintenant, levons ensemble nos voix et nos poings et disons NI UNA MENOS, ELE NAO, BLACK LIVES MATTER et JIN JIYAN AZADI!

Réseau « Women Weaving the Future »