La direction générale de la Sécurité Extérieure (DGSE) s’est abstenue de présenter aux autorités judiciaires les informations concernant les personnes avec lesquelles Omer Guney s’est entretenu par téléphone. Par conséquent, le tribunal a demandé ces informations aux autorités turques. Cependant, les enregistrements effectués depuis la France, sur des canaux de satellite français, ne sont pas à chercher en Turquie mais bien ici. 

8 ans se sont écoulés depuis le triple assassinat de Paris. Les preuves, documents, et informations concernant cette affaire sont abondants ; cependant, les procureurs de l’enquête, le tribunal et les avocats de l’affaire se sont engagés dans une coopération tacite pour geler ces informations afin que le temps les fasse oublier.

Les services de renseignement français, parmi les plus influents au monde, ont sur écoute, de nombreux pays dont les Etats-Unis et la Russie. Dans un article préparé et publié par le journal Le Monde en 2013, il était indiqué que ceux-ci enregistraient arbitrairement, des communications informatiques, des conversations et messages téléphoniques, des publications Facebook et Twitter hors de France et en France et partageaient ces données avec d’autres services de renseignement.

Ainsi, les services de renseignement français ont fait preuve d’une irresponsabilité concernant les assassinats des militantes kurdes et se sont efforcés de clôturer cette affaire au plus vite. La demande des avocats des parties civiles pour la levée du secret défense, a été rejetée suite à l’obstruction des services de renseignements. Les informations évoquées dans l’acte d’accusation sont les suivantes :

Depuis la France, Omer Guney a utilisé le numéro de téléphone : +33 6 58 46 62 20, avec lequel il a appelé 13 numéros différents en Turquie. Le deuxième numéro de téléphone qu’a utilisé Guney est le : +33 6 69 64 75 91. Depuis ce numéro il n’a passé des appels qu’à une seule personne, sur un numéro turc (+90 533 163 79 55).

La DGSE n’a pas présenté les informations concernant les personnes avec lesquelles Omer Guney s’est entretenu par téléphone et la transcription de ces conversations dans le dossier judiciaire ; le tribunal a demandé ces informations aux autorités turques. Cependant les enregistrements et la transcription des conversations depuis la France sur les canaux de satellite français ne sont pas en Turquie mais bien ici. Faire la demande à la Turquie relève d’un non-sens, celle-ci n’allant jamais y donner une réponse favorable.

La DGSI, a quant à elle, identifié le numéro de téléphone +90 533 163 79 55, qui était en contact avec Omer Guney et se trouvait sur le territoire français entre le 30 aout 2012 et le 20 janvier 2013. Les informations concernant l’identité de cette personne et la transcription de ces conversations ont été demandées à la Turquie. Cependant les enregistrements de ces conversations sont aussi en France. 

Une autre obstruction flagrante de la DGSE et de la DGSI apparait dans l’acte d’accusation :

L’ancien « collègue de travail » d’Omer Guney, Ruhi Semen et son fils Umit Semen, ont demandé à rendre visite à Guney qui se trouvait à la maison d’arrêt de Fresnes. Le procureur et l’administration pénitentiaire l’ont autorisé. Les services de renseignements et de la police française en ont également été informés. Comme clairement indiqué dans l’acte d’accusation, ils équipent le parloir et installent plusieurs dispositifs d’écoute et de caméras.

Cette visite sous contrôle, a été décrite dans l’acte d’accusation comme suit : « un document très compréhensible a été obtenu grâce aux contributions des experts qui ont été chargés d’augmenter la qualité sonore des dialogues, lors de la rencontre, avec la méthode de filtrage du bruit et le travail minutieux du traducteur en langue turc, qui a dans un premier temps retranscrit à l’écrit, l’entretien oral en turc afin de le traduire en français. (…) Au cours de cette entretien, il s’est avéré qu’outre le fait qu’Omer Guney a mis en œuvre différentes astuces pour contrecarrer la surveillance dans le parloir, il a profité de cette visite pour donner une lettre à Ruhi Semen ».

Les services de renseignement, qui surveillent et enregistrent la visite, permettent à Ruhi Semen de partir. Ce désastre est retranscrit dans l’acte d’accusation comme suit : « les tentatives des enquêteurs pour écouter Ruhi Semen et saisir le papier/document remis par Guney ont échoué. Bien que Ruhi Semen ait répondu à l’appel sur son téléphone et ait confirmé qu’il se rendrait le lendemain (dimanche) au bureau de la sous-direction anti-terroriste (SDAT) à Levallois Perret, il a choisi de s’échapper et s’est rapidement mis en route pour l’Allemagne ».

Outre ce désastre théâtral dans lequel les services de renseignements sont impliqués, et outre les meurtres commis par Omer Guney, avec la participation de Ruhi Semen et son fils Umit Semen, Guney a également tenté de s’évader. 

Et ensuite ?

Un acte d’accusation supplémentaire a été préparé pour la tentative d’évasion.

Dans celui-ci, il est déclaré que : « ces crimes commis en France, en Allemagne, et en Turquie en 2013 et 2014 ne sont pas prescrits. Il est aussi clairement indiqué que la tentative d’évasion a été planifiée entre des individus en France et en Allemagne.

Omer Guney est décédé, mais aucune poursuite n’a été intentée contre Ruhi Semen et Umit Semen qui étaient les planificateurs et les principaux auteurs de la tentative d’évasion. Ruhi Semen et Umit Semen bénéficient-ils d’une immunité ? La tentative d’évasion a-t-elle cessé d’être un crime en France ou en Allemagne ?

Les membres du MIT détenus par les Forces de défense du peuple (HPG), Erhan Pekcetin, et Aydin Gunel, chef du département des ressources humaines nationales et internationales du MIT, ont déclaré qu’Omer Guney était bien un membre du MIT et ont donné une information très importante qui change le cours du procès du triple assassinat : 

Après une rencontre d’Omer Guney avec les membres du MIT, son billet de retour depuis Ankara pour Paris a été acheté par le MIT. Ce billet a été acheté à l’agence de Turkish Airlines (THY) à Ankara dans le quartier Yeni Mahalle, dans la résidence Bati Lojmanlari. 

Erhan Pekcetin a déclaré que ce sont les fonctionnaires du MIT et leurs familles qui vivent dans les logements de cette résidence, qu’un accès depuis l’extérieur à celle-ci n’est pas possible, et que de fait, ladite agence THY n’est accessible que pour les transactions de billets des fonctionnaires du MIT. Pekcetin a déclaré que les renseignements français avaient eu connaissance de cet élément et que sur la base de celui-ci, ils ont demandé des informations à propos d’Omer Guney au MIT mais qu’aucune réponse n’avait été donné.

D’après les informations fournies par les agents du MIT arrêtés, l’une des deux personnes ayant planifiés les assassinats avec Omer Guney est Kaan Ayik, haut gradé du MIT et le second, Oguz Yuret, est directeur de la branche du département des opérations contre le PKK à l’étranger du MIT.

Après les assassinats, les deux chefs de départements ont été récompensés par Tayyip Erdogan qui les a mutés à des postes supérieurs.

En plein milieu de Paris, les victimes des meurtres ordonnés par le MIT, ont été sacrifiées pour sauvegarder les intérêts commerciaux et les relations politiques de la France avec la Turquie.

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