Dans la province de Dersim (Tunceli en turc), des organisations écologistes, des partis politiques et des groupes de la société civile ont appelé à l’arrêt immédiat du projet de barrage prévu dans la vallée d’Aliboğazı. Ce lundi, de nombreux militants et citoyens se sont rassemblés devant le bâtiment de l’Autorité nationale des eaux (DSI), brandissant des banderoles où l’on pouvait lire : « Ne touchez pas à ma nature, mon eau, ma terre ».
Yusuf Topçu, président de l’Association écologique de Munzur, a dénoncé une longue histoire de « politique de prédation » dans la région. « Depuis l’Empire ottoman, Dersim est confrontée à des déplacements, des destructions et des restrictions. Aujourd’hui, les projets de barrages et de mines cherchent à engloutir la mémoire sociale et les lieux sacrés », a-t-il déclaré.
Topçu a souligné l’importance particulière de la vallée d’Aliboğazı, qu’il décrit comme la « porte d’entrée de Dersim ». Riche en biodiversité, ce site abrite également des sites religieux, des églises historiques, des grottes et des anciens villages. « Aliboğazı est très important pour les habitants locaux — c’est là que des personnes déplacées ont autrefois trouvé refuge », a-t-il rappelé.
Selon lui, le barrage menacerait de nombreux villages, pâturages et vallées secondaires, avec des conséquences graves : changement climatique, sécheresse accrue et perte de biodiversité.
Des juristes ont également pris la parole. Barış Yıldırım, avocat spécialisé en droit de l’environnement, a rappelé que plusieurs barrages avaient déjà été construits dans la région, entraînant la disparition de sept espèces végétales endémiques. « Cette zone est pourtant classée sous haute protection. Malgré cela, elle est en train d’être détruite », a-t-il affirmé. Parmi les espèces menacées figurent les chèvres sauvages, les lynx, les ours, les loups, et le léopard, devenu rare en Anatolie. Des rapports d’experts recommandent depuis longtemps de placer le bassin de Tağar sous protection intégrale. « Un nouveau projet de ce type serait une catastrophe écologique », a insisté Yıldırım.
La mobilisation a également reçu le soutien de la Fédération des associations de Dersim (DEDEF). Son président, Ali Rıza Bilir, a déclaré que les projets de barrage et d’exploitation minière ne servaient pas les intérêts de la population, mais mettaient en péril ses moyens de subsistance. « Ces projets chasseraient à nouveau les habitants et détruiraient leur patrimoine culturel », a-t-il affirmé. Il a ajouté que la résistance se poursuivrait, en coordination avec toutes les institutions démocratiques et les initiatives écologistes.
Les militants ont annoncé qu’ils poursuivraient leur campagne contre la construction du barrage d’Aliboğazı et contre d’autres projets d’infrastructure menaçant la région de Dersim.