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Serhat Varto, représentant des relations extérieures de l’Union des Communautés du Kurdistan (KCK).

Dans le cadre d’une interview réalisée par le journaliste Sylvain Mercadier pour Rojinfo, Serhat Varto, représentant des relations extérieures de l’Union des Communautés du Kurdistan (KCK), a parlé de la différence entre le KCK et le PKK.

S.M : Parlez nous de la différence entre le KCK et le PKK, qui ne sont pas des organisatinons très connues en Europe.

S.V. : Le PKK a été créé pour répondre aux demandes du peuple Kurde qui exigait la liberté et la reconnaissance de son identité. Initialement, le but du PKK était la création d’un État indépendant et unifié. Après près de quarante années de lutte, son objectif a évolué. Il se concentre désormais sur une solution démocratique de la question Kurde et sur l’établissement d’une société Kurde basée sur la démocratie, l’écologie et l’émancipation de la femme (ou des genres).

Le PKK, selon cette nouvelle formule, pense qu’une solution raisonnable ne peut pas être obtenue si l’on  se penche seulement sur les problèmes politiques. Nous pouvons aboutir à des solutions plus complètes si l’on s’addresse aux problèmes sociaux, culturels et historiques également. La solution politique ne suffira pas à elle seule. Elle doit comporter d’autres dimensions.

Dans l’histoire moderne, le problème national a été appréhendé soit selon le point de vue socialiste, soit capitaliste. D’innombrables mouvements politiques ont tenté de trouver une solution aux questions nationales selon ces deux courants de pensée. Leur solution a toujours été l’établissement d’un État. Mais à mesure que le temps passait, il s’averra que de donner la priorité à une solution basée sur l’État-Nation, qu’il soit socialiste ou capitaliste ne n’apportait pas de solutions au problème national et à la question des sociétés et des communautés dans leur ensemble. L’État-Nation n’est pas une solution durable et réaliste pour tous les peuples et leurs problèmes sociétaux.

Le KCK est le modèle organisationnel pratique de cette idéologie, dans toutes ses variantes. Il les réunit dans son système. Les différent partis qui s’y retrouvent rassemblent des strates plus étroites des sociétés dans lesquelles ils se déploient. Aucun parti ne peut être assez flexible au point de rassembler toutes les variantes d’une même société. Puisque les sociétés sont composés d’ensembles aussi divers, une organisation qui les chapeaute toutes devient alors nécessaire.

Le KCK est donc un modèle dans lequel tous ces différents partis peuvent s’organiser et s’exprimer librement. Le critère de base du KCK est la démocratie. Pour le PKK, les critères de base sont la démocratie, l’écologie et l’émancipation de la femme.

S.M : Finalement, le KCK est-il une superstructure qui regroupe tous les différents partis qui s’inspirent de la pensée d’Abdullah Ocalan ?

S.V :Nous n’avons pas une telle dichotomie au sein du KCK. Le KCK est fondé sur la nature de la société comprise dans sa totalité, dans sa nature communale (en tant que communauté). Il y a beaucoup de sociétés qui s’organisent en ayant des manière de penser divergentes. Chaque société a sa propre histoire. Il y a différent types de sociétés ayant une organisation centrée par exemple sur la religion, la langue, etc… Au sein du KCK, il n’est pas nécessaire pour les groupes membres d’entériner ou de s’identifier avec les idées et le paradigme d’Abdullah Ocalan. Mais il y a des critères communs qui forment l’essence des différentes communités qui le composent.

Ce sont donc ces critères communs qui importent au sein du KCK : toutes les sociétés ont une essence démocratique et il y a différents facteurs qui ont amené ces sociétés à se dresser les unes contre les autres. On trouve au sein des sociétés des goupes d’intérêts qui poussent pour tel ou tel type d’organisation de la société qui sert leurs intérêts privés. Ces groupes d’intérêts qui veulent diviser pour mieux régner s’appuient sur le nationalisme, le sectarisme etc… Ils sont les principaux responsables des conflits dans la société. Le critère de base pour ramener les sociétés ensemble n’est pas la pensée d’Ocalan, mais lesprincipes de la démocratie au sein desquelles elles se retrouvent toutes.

La démocratie peut être définie de deux manières :
– l’état naturel des sociétés avant que la structure Étatique n’apparaisse
– la seconde sont les valeurs que les opprimés ont élaboré après des milliers d’années de lutte contre les classes dominantes de la société.

Au sein du KCK, on retrouve plusieurs groupes culturels qui se retrouvent dans ces valeurs humaines. C’est un modèle. Chaque société peut l’adapter selon la situation dans laquelle il se trouve. Il est mis en place dans les quatres régions formant le grand Kurdistan en Irak, Iran Syrie et Turquie à différents niveaux. C’est un modèle pour sociétés organisées. C’est un modèle alternatif au sein duquel les acteurs non-étatiques peuvent se développer.

Si une  société parvient à puiser dans ses propres ressources en dehors de l’État (au plan culturel, éducationnel etc…), c’est que le modèle du KCK y est appliqué. Le KCK n’a pas besoin d’attendre la fin de l’État pour être mis en pratique. Il peut être appliqué dès aujourd’hui. Il requiert toutefois un certain degré d’institutionnalisation du fait de l’interrelation de toutes ces structures entre elles d’une manière ou d’une autre.

Dans des endroits comme le Rojava par exemple, les opportunités sont multiples du fait du recul de l’État central. Tous les groupes ethniques et religieux au Rojava ont leurs propres organisations, comme les Arabes, les Arméniens, les Kurdes, les Assyriens, les Syriaques etc… Et ils sont tous interreliés entre eux.

S.M : Est-ce que le système de Confédéralisme Démocratique tel qu’il est appliqué au Rojava fait partie du KCK ou bien est-ce une structure différente ?

S.V : Il n’a pas de relation directe avec le KCK. Il est autonome. Chaque société est confédérale en un sens. Toutes les sociétés peuvent se regrouper et construire ensemble un plus grand système confédéral, que ce soit dans le Nord  la Syrie ou dans tout le Moyen-Orient.

S.M : Et le parti,HDP, fait-il partie du KCK ?

S.V : Non, il n’en fait pas partie du point de vue organisationnel. Mais du point de vue idéologique, il aspire à établir un système de confédéralisme démocratique en Turquie. Le modèle que nous avons établi dans les montagnes peut être perçu comme un modèle et s’adapter selon les circonstances. Le confédéralisme peut prendre de multiples formes. Au Moyen-Orient par exemple, le tribalisme est encore important. C’est probablement différent de l’Europe où les sociétés sont plus individualistes. Mais le principe de base est le même : chaque individu fait partie d’une société et chaque société est à la base démocratique, tout comme les sociétés sont interconnectées par des besoins naturels. Le confédéralisme démocratique est le modèle organisationnel social et politique pour toutes ces différentes sociétés. Que les sociétés s’identifient selon leur religion, ethnicité, nationalité, tribu etc… elles peuvent toutes trouver leur place au sein du confédéralisme démocratique.

S.M : Pouvez-vous me parler de la relation entre le PKK et le parti Tevgera Azadi, que beaucoup présentent comme la vitrine politique du PKK au Kurdistan Irakien ?

S.V : On nous demande souvent les mêmes questions : Quelle est notre relation avec Tevgera Azadi, avec le PJAK, avec le Rojava etc… Ce sont des question fréquentes. Je vais répondre par analogie avec le Marxisme. Le Marxisme est une école de pensée et on retrouve des groupes dans chaque pays qui s’appuient sur le Marxisme . Mais tous ces groupes ne collaborent pas forcément entre eux. Cela peut apporter un élément de réponse à la question. Au sein des quatre Kurdistans, il y a de nombreux mouvement sociaux etpolitiques qui ont fondé leurs principes sur le paradigme d’Abdullah Ocalan. Toutes ces organisations sont engagées à résoudre les problèmes de leurs sociétés respectivesen s’efforçant d’appliquer le paradigme d’Apo. Marx avait anticipé la solution aux problèmes sociaux via la dictature du prolétariat dans les sociétés les plus industrialisées et par la formation d’État-Nations. Apo est allé au delà de ces principes. Il propose de stimuler le caractère démocratique inhérent à chaque peuple ainsi que le Confédéralisme Démocratique et l’industrialisation écologique. Ces idées forment l’épicentre de sa pensée.

L’industrialisation écologique vise à appréhender les questions de production de biens et de nourriture en dehors du cycle de la consommation de masse et des dégâts écologiques qu’elle cause.

Tevgera Azadi, HDP et tous ces différents partis veulent mettre en pratique ces principes où il sont actifs. C’est à eux de faire les bons choix politiques dans cette direction, de faire des alliances etc… Mais l’objectif final de ces goupes est l’établissement du Confédéralisme Démocratique dans toute la région.

L’État-Nation est le principal reponsable des problèmes du Moyen-Orient aujourd’hui. Non seulement n’est-il pas capable de résoudre les poblèmes sociaux, il les engendre plus qu’autre chose. L’État-Nation vise à la création de sociétés homogènes. Mais le sociétés sont hétérogènes par nature. Nulle part sur Terre a-t-on vu des sociétés totalement indépendantes les unes des autres. Faisons une autre analogie avec ma propre personne : Je suis Kurde. Mais en même temps, je suis également Turc, Persan, Arabe, Assyrien, Arménien… à un certain degré. J’ai incorporé des pans de ces identités parce que toutes les cultures vivent interreliées les unes aux autres au Moyen-Orient. Et cela vaut également pour les peuples turcs et Persans. Ils sont tous, à un certain degré, influencés par d’autres cultures.

Donc la Kurdicité de Massoud Barzani, la Turquicité d’Erdogan, l’Arabité des dirigeants Arabes et l’Iranité de Rohani etc… ne prennent pas en compte ces réalités sociales et leurs complexités. C’est pourquoi ils pratiquent la division pour mieux régner. Ils montent les différents pans de la société les uns contre les autres. Ils fondent leur propre hégémonie sur cette frature là. Nous soutenons que cette approche est destructive, perpétue les conflits indéfiniment, et mène à la catastrophe. Erdogan veut turquifier les Kurdes, Barzani veut séparer les Kurdes des autres peuples voisins. L’un dit : « nous sommes un seul peuple », l’autre « Nous sommes tous différents ». Notre position est que nous sommes tous à la fois différents et similaires. Nous sommes mutiples et divers. Reconnaître ces différences et ces similarités est la clef pour vivre ensemble. Une part de l’autre vivra en moi et une part de moi vivra en l’autre. Nous ambitionnons de développer un tel modèle et nous pensons qu’un tel modèle finira par être accepté au Moyen-Orient parce que l’on peut déjà voir les effets positifs de ce modèle. La notion de vivre ensemble, de coexistence est présente dans la mémoire et la mentalité collective de toutes les sociétés. C’est pourquoi beaucoup de gens admirent le modèle que nous soutenons.

S.M : Quid de l’annonce faite il y a quelques mois de communes et cantons dans les montagnes du Kurdistan Irakien basées sur le modèle du Rojava suite à l’échec du référendum d’indépendance intenté par Massoud Barzani ?

S.V : La région de Qandil où a eu lieu l’annonce fait partie de la Région autonome du Kurdistan Irakien. La population des montagnes de Qandil, inspirées par le modèle du Rojava on effectivement annoncé leur volonté de mettre en place un système similaire. La population de la région de Qandil souffre de poblèmes économiques. Il y a beaucoup de besoins ici. Aucune société  ne peut vivre sans auto-gestion et auto-administration à un certain niveau. L’assemblée des habitants de Qandil espère pouvoir résoudre ses problèmes et besoins de la sorte. Les municipalités fonctionnent, résoudent les problèmes sociaux et lance des projets économiques. Cette assemblée est comme un corps politique supérieur qui inclut les communes de chaque village, une sorte d’assemblée pour supérieure qui rapproche toutes le communes entre elles. Comme Qandil est une zone rurale, la société n’a pas un type de fonctionnement très complexe. Cela facilite l’organisation de telles assemblées. Les communautés ici ont vécu en dehors de l’État pour la plupart. Les gens se sont appuyés sur leur propres ressources pour administrer leurs affaires, pour résoudre leurs problèmes et pour améliorer leur situation économique en dehors du contrôle de l’État depuis longtemps. Ce qui a été mis en place ici n’est qu’un remodelage d’un système qui fonctionnait déjà. Certaines personnes prétendent que nous voulons faire sécession de  la région du Kurdistan Irakien, mais ce n’est pas vrai. Nous ne faisons que soutenir des initiatives d’auto-gestion.

S.M : Parlons de la diplomatie du PKK. Quelle est la situation diplomatique entre le PKK et l’Iran par exemple, à la lumière des événements géopolitiques actuels et de la situation au Moyen-Orient ? L’Iran s’appuie-t-il sur le PKK pour stabiliser sa frontière avec le Kurdistan Irakien ?

S.V : Que l’on parle de la question de la résolution de la question Kurde ou de l’établissement d’une alternative politique au Moyen-Orient, la diplomatie est inévitable. Aucun problème social ne peut se résoudre par les seuls moyens politiques ou militaires. C’est pourquoi il y a toujours une dimension diiplomatique aux activités du KCK et du PKK. Concernant la question Kurde, l’État Turc est le principal acteur qui cause un dilemme et une impasse. Depuis sa création, l’État Turc a tenté de nier l’existence des Kurdes et la question Kurde. Il a tenté d’assimiler les Kurdes.

À chaque fois que les Kurdes ont résisté aux pratique génocidaires de l’État Turc, ils ont dû faire face à des massacres et une répression encore plus importants. La principale raison qui a poussé le PKK à prendre la voie du conflit armé est que l’État Turc ne voudra jamais reconnaitre l’existence du peuple Kurde et de la question Kurde de son plein gré. Les balles que le PKK tire ne doivent pas être vues comme de simples balles. Chaque balle que le PKK tire est le cri d’un Kurde qui dit « Je suis là, j’existe ». La Turquie ne laisse aucune place aux Kurdes pour faire entendre leur voix. Le fait que la question Kurde commence à peine à être mise à l’ordre du jour en Turquie s’est fait au prix de nombreuses vies sacrifiées par le PKK et le peuple Kurde. Mais même après toutes ces années de lutte, l’État Turc ne veut toujours pas résoudre la question Kurde. Certes, il fait quelques concessions de temps en temps, mais ce ne sont que des stratagèmes pour annéantir les Kurdes par la suite. Les approches Iranienne et Irakienne ne sont pas aussi dogmatiques et répressives envers les Kurdes. Cela est dû au fait que que le modèle de l’État-Nation n’a pas été mis en place de manière aussi radicale dans ces pays. De fait, la répression contre les Kurdes dans ces deux pays n’est pas aussi dure qu’en Turquie. Il y a deux raisons qui ont amené le PKK à touver un terrain diplomatique avec les autorités de ces deux pays : Ils ne sont pas aussi radicaux dans leur manière d’appréhender les populations Kurdes de leurs territoires et ils sont en rivalité avec la Turquie, ce qui a ouvert la voie pour le PKK à la diplomatie avec eux. Mais l’Iran et la Syrie n’ont pas fait les bons calculs. Ils n’ont pas imaginé que de collaborer avec nous allait nous permettre de nous développer autant et d’avoir autant de succès. Ils pensaient qu’ils allaient pouvoir instrumentaliser le PKK come ils ont instrumentalisé d’autres organisations. Mais le PKK a réussi à conserver son indépendance, à progresser et à devenir une force dans la région. Mais arriver à ce statut a aussi modifié nos relations et a amené de nouvelles frictions avec ces pays.  Cela se perpétue encore aujourd’hui. Bien que ces trois pays (Iran Irak, Syrie) coopèrent avec la Turquie et ont des politiques anti-Kurdes, ils sont parfaitement conscients que la Turquie n’aidera en rien à résoudre la question Kurde et donc ils gardent toujours une fenêtre ouverte avec les opposants de la Turquie pour résoudre cette question Kurde.

Le PKK n’est pas en mesure de sécuriser les frontières d’un pays quelqu’il soit. La question Kurde a sa source en Turquie, dans les politiques de l’État Turc et dans son déni de l’annihilation des Kurdes. Si une fissure se fait dans cette politique, il y aura possibilité de résoudre les problèmes du peuple Kurde.

S.M : Dans l’éventualité d’un cessez-le-feu entre le PKK et la Turquie, y a-t-il une option ouverte pour des négociations ?

S.V : Il n’y a aucune option de ce genre sur la table pour le moment. Notre priorité a toujours été la résolution pacifique et démocratique de la question Kurde et le principal interlocuteur à ce sujet et le leader Apo qui est désormais en prison.

S.M : Avant 2015 et la reprise des hostilités avec l’État Turc, qu’avait-il sur la table des négociations entre le PKK et l’État Turc ?

S.V : Nos demandes sont claires. Nous voulons  une auto-gouvernance démocratique, l’autodétermination, la possibilité de prendre nos propres décisions. Nous ne voulons pas diviser ou démanteler la Turquie pour faire un État indépendant. Nous voulons une solution à la question Kurde basée sur l’auto-gouvernance démocratique.

S.M : Si la Turquie envahit le canton de Manbij, est-ce que le PKK va envoyer des troupes comme il l’a fait à Kobaneh ?

S.V : Il est trop tôt encore pour prédire une telle décision. Les Forces Démocratiques Syriennes sont engagées dans un processus de résistance contre la Turquie. Mais quoi qu’il arrive, nous ferons ce qu’il fait pour aider notre peuple dans le Nord de la Syrie et dans les autres parties du rojava.

S.M : Je sais que la bataille d’Afrine n’est pas terminée, mais que pouvons nous retenir concernant le déroulement des événements de ces derniers mois ? On ne peut pas parler de défaite pour le moment, mais 80% du territoire d’Afrine a été perdu, dont la ville d’Afrine. Que pouvons-nous apprendre de cela ?

S.V : La Troisième Guerre Mondiale est toujours en cours dans la région. La bataille d’Afrine est une étape d’un long processus. Ce serait une erreur de calcul de la part de la Turquie ou de la part de quiconque de penser qu’ils ont gagné quoi que ce soit à Afrine. Il y eu une grande résistance à Afrine. Cette résistance est une pierre angulaire dans le processus de formation nationale Kurde. La résistance amènera à la création de cinquante autres Afrine au Kurdistan. Elle a universalisé la résistance Kurde et les valeurs démcratiques des Kurdes ainsi que leur quête pour une communauté démocratique. Elle a aussi internationalisé la brutalité et la nature réactionnaire de l’État Turc. Cela aura des conséquences durables pour lui ainsi que pour la Russie. Le monde entier a aussi pu voir comment la Russie est peu scrupuleuse, hypocrite et prête à faire de basses tractations au détriment de notre peuple. De fait, à Afrine, nous ne sommes pas au bout du processus. Ce n’est que le commencement. Ces combattant que la Turquie a amené pour envahir une terre Kurde, et bien les Kurdes peuvent également leur mettre une épine au pied. La Turquie sera un gros problème pour l’Iran, la Syrie et la Russie, non pas seulement à Afrine, mais à al-Bab également.

S.M : Manbij est un canton multicuturel, mais principalement Arabe. On entend que certains chefs tribaux là-bas ne sont pas entousiastes envers le Confédéralisme Démocratique et qu’ils seraient prêts à refaire allégeance à Bashar al-Assad. Cela ne montre-t-il pas les limites de l’expansion du paradigme d’Ocalan, que les autres groupes ethniques perçoivent comme une simple idéologie Kurde, qu’il sera difficile de convaincre les autres groupes de le mettre en pratique ?

S.V :Le problème ne réside pas dans l’idéologie d’Ocalan. Nous n’approuvons pas que les Kurdes gouvernent les Arabes à Manbij. Les différentes sociétés doivent s’administrer d’elles-mêmes. À Manbij, il ne devrait pas y avoir de telles pratiques. L’idée primordiale est que les peuples puissent s’organiser d’eux-mêmes. Mais nous sommes dans une zone de conflit, et il y a beaucoup de provocations de la part des autres forces comme la Russie et le Turquie. Mais l’idéologie d’Ocalan est claire et proclame « Vous devez vous administrer vous-même » . Elle ne dit pas que d’autres forces ou peuples devraient venir et vous.

S.M : Cela signifie-t-il que le TEV-DEM n’est pas assez inclusif ?

S.V : Il peut y avoir des cas de manque d’inclusivité. Mais cela est probablement dû à la situation exceptionnelle de guerre.

S.M : Y a-t-il parfois des tensions entre le PKK et les différents groupes quui administrent le Nord de la Syrie ?

S.V : Il n’y a pas de relations organique entre nous et eux. On ne peut pas parler tensions. Toutefois, il peut y avoir des différences de points de vue parfois entre nous et eux.

S.M : Concernant le Sinjar et la manière dont le gouvernement a réagi aux menaces Turques. Comment le PKK voit-il ces événements ? Ont-ils pu prendre avantage de la situation ? Le retrait était-il inévitable ? A-t-il complètement évacué la zone ou ont-ils encore quelques points d’ancrage ?

S.V : Le PKK s’est retiré du Sinjar. Nous avons accompli la mission que nous nous étions fixé, à savoir d’aider les Yézidis à créer leur propre organisation sociale et d’auto-défense afin qu’ils puissent répondre à d’autres menaces de massacre à l’avenir. Les massacres ont étés stoppés et les Yézidis ont pu établir leur propre auto-gestion. Les Unités de protection du Sinjar sont toujours en place dans la zone . Elles collaborent avec l’armée et le gouvernement Irakiens. Le gouvernement Irakien se comporte convenablement envers les Yézidis. Il n’y avait donc rien de plus justifiant notre présence au Sinjar. Notre retrait n’avait rien à voir avec le manaces et la pression Turques. Si vous regardez l’histoire du PKK il ne s’est jamais retiré d’une zone sous la menace de ses ennemis. Il a toujours résisté. Mais il est vrai que ce retrait a permis de contrecarrer les plans de la Tuquie qui espérait envahir l’Irak sous le prétexte du PKK. En Irak, il y a des acteurs politiques qui veulent voir la Turquie envahir  la région du Nord de l’Irak. Certains cercles sunnites par exemple, veulent attirer la Turquie et gagner en puissance, tel Atheel al-Nujaifi, l’ancien  gouverneur de Mossoul et chef du conseil de Mossoul.Il y a beaucoup d’autres membres du Parlement Sunnites dans la même démarche. Ils veulent plus de présence Turque en Irak. Le retrait du PKK a empêché un tel scénario.

Par Sylvain Mercadier

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