Etonnante rencontre avec Besime Konca, députée kurde, de passage à Rennes pour mobiliser l’électorat kurde de la diaspora en prévision des prochaines échéances électorales en Turquie. Et ce, dans le cadre d’une campagne électorale déclenchée précipitamment en Turquie après la manipulation du président Erdoğan qui convoque des élections anticipées, législatives et présidentielle, le 24 juin prochain. http://www.akb.bzh/spip.php?article1302. Cette manœuvre interroge : l’autocrate sent-il son pouvoir vaciller? Selahattin Demirtaş sera candidat contre Erdoğan au poste de président et, Besime Konca me l’a certifié, il y aura dans chaque circonscription un candidat présenté par le HDP, qui ne l’oublions pas est le « Parti de la démocratie des peuples« , le seul qui est porteur d’espoir et de changement, selon Mme Konca :

 » A vrai dire le HDP est le seul parti qui peut apporter un changement politique radical en Turquie, prônant la démocratie, la décentralisation, la laïcité, l’égalité homme/femme. Le HDP reconnait la société comme étant multi-identitaire, multiculturelle, multilingue et multiconfessionnelle. Il propose une nouvelle définition de la citoyenneté dans une constitution qui serait basée sur la reconnaissance de l’égalité des identités, des langues, des croyances et des cultures et considère l’Autonomie démocratique comme un modèle qu’il propose comme objectif au pays tout entier ».

C’est une vraie révolution, pacifique, certes, mais fondamentale pour la Turquie d’aujourd’hui. Besime Konca y croit et se fixe comme objectif un groupe de députés HDP à la « Grande Assemblée » (parlement de Turquie) fort de 80 à 100 députés.

La prison est la plus grande université en Turquie

Besime Konca sait de quoi elle parle quand on évoque la prison. Originaire de la petite ville Elbistan, – comme Fidan Dogan (Rojbin) assassinée à Paris par les services secrets turcs (MIT) le 10 janvier 2013 -, diplômée de l’Université Samsun, cette jeune femme souriante a déjà passé plus de 18 ans derrière les barreaux. Après 12 années ans de prison entre 1993 et ​​2004 pour « crimes politiques », elle est de nouveau arrêtée en 2009 dans le cadre des procès du KCK et retourne en prison. Elle sera libérée 5 ans plus tard en 2014. Membre du Congrès des femmes libres, membre du Conseil exécutif du Parti de la société démocratique (DTP), elle est présentée par le HDP aux élections législatives de 2015 et élue députée de SIIRT. Interpellée le 13 décembre 2016, elle rejoindra en prison Gültan Kışanak, maire métropolitaine de Diyarbakir, après qu’elle ait manifesté, le 29 octobre 2016, devant la mairie de Diyarbakir, sa solidarité avec les co-maires de Diyarbakir emprisonnés. Démise de ses fonctions, Besime Konca est néanmoins remise en liberté le 3 mai 2017 par la II° Haute Cour pénale de Batman qui l’a placée sous contrôle judiciaire. A peine arrivée en France, avec un visa en règle, qu’un mandat d’amener est lancée contre elle.

Les conditions en prison sont très dures, la surpopulation est terrifiante, mais la vie s’organise. Rien n’arrête le militantisme. Le temps est consacré à la réflexion, aux échanges de savoirs, L’atmosphère est studieuse. Tous et toutes sont à la fois enseignants et enseignés. Besime nous apprend que Gültan Kışanak écrit un livre. Les activités culturelles et artistiques (dessin, guitare) aident à supporter les conditions carcérales. Tous et toutes suivent avec attention la préparation des élections et soutiennent les candidats HDP.

Besime Konca, qui sera de nouveau interpellée à son retour en Turquie, n’a pu, quand nous avons évoqué l’attitude des pays européens, cacher son désappointement : « quand nous parlons avec les européens, ils sont d’accord pour déplorer la situation en Turquie, mais ça s’arrête là. S’ils ne soutenaient pas cette politique anti démocratique, le président Erdoğan ne pourrait se maintenir au pouvoir »

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