Le Conseil des femmes du HDP demande la libération immédiate de la politicienne et avocate kurde Aysel Tugluk, emprisonnée depuis cinq ans et dont l’état de santé se dégrade au fil du temps.
Emprisonnée en Turquie depuis cinq ans, la politicienne kurde Aysel Tugluk souffre d’une maladie invalidante qui nécessite un traitement régulier. Le Conseil des femmes du Parti démocratique des Peuples (HDP) demande sa libération immédiate.
Aysel Tugluk est détenue dans la prison de Kandıra, à Kocaeli, dans l’ouest de la Turquie, depuis le 28 décembre 2016. L’avocate, qui a représenté Abdullah Öcalan entre autres, a déjà été condamnée dans plusieurs procès. D’autres procédures engagées à son encontre sont encore pendantes. En février 2020, la cour d’appel a confirmé la plus lourde peine de prison prononcée à ce jour à l’encontre de Tugluk, soit dix ans d’emprisonnement. La femme politique de 56 ans a été reconnue coupable de « direction d’une organisation terroriste » en raison de sa fonction de coprésidente du Congrès pour une Société démocratique (DTK, Organisation faîtière de la société civile). Cette condamnation a été suivie mi-octobre d’une peine de vingt mois d’emprisonnement pour propagande terroriste. L’ancienne députée risque par ailleurs une peine de prison à vie aggravée dans le cadre du procès dit de Kobanê.
Dans une déclaration publiée mercredi, le Conseil des femmes du HDP a souligné que la maladie d’Aysel Tugluk n’a pas été rendue publique pendant longtemps à sa demande. Cependant, comme son état se dégrade de plus en plus, mettant sa vie en danger, la solidarité publique est indispensable, estime le Conseil. La commission pénitentiaire de la branche d’Istanbul de l’Association des Droits de l’Homme (IHD) a également attiré l’attention sur ce point et demandé la suspension de la peine restante. La prisonnière, qui souffre de perte de mémoire, est dépendante de l’aide de ses codétenues. Il y a quelque temps, le département de médecine légale de l’université de Kocaeli a diagnostiqué une invalidité chez Aysel Tugluk et recommandé sa libération urgente. Cependant, le parquet a rejeté les demandes de libération déposées par ses avocats.
Le Conseil des femmes du HDP a déclaré que la perte de mémoire de Mme Tugluk était consécutive aux funérailles de sa mère. En septembre 2017, l’attaque des funérailles de Hatun Tugluk par une foule nationaliste turque avait suscité l’indignation. Des centaines de personnes avaient attaqué les funérailles à Ankara avec des pierres et crié des slogans de haine contre les Arméniens et les Alévis. Les restes de la mère d’Aysel Tugluk avaient dû être exhumés car la foule menaçait de profaner la tombe. Quelques jours plus tard, Hatun Tugluk avait été inhumée à Dersim sans que sa fille puisse assister à l’enterrement, l’administration pénitentiaire ne lui ayant pas accordé un second permis spécial. Selon le Conseil des femmes du HDP, Aysel Tugluk ne s’est jamais remise de cette expérience traumatisante : « Le responsable de la maladie d’Aysel Tugluk est le gouvernement du régime de l’homme unique. Il tente de se maintenir au pouvoir par la guerre, la mort, le sexisme, la polarisation, la discrimination et le militarisme et prend les opposantes politiques en otage. Un droit pénal ennemi vindicatif est utilisé contre Aysel Tugluk qui a passé sa vie à lutter pour les droits des femmes, des Kurdes et des Alévis, et qui a été la première femme en Turquie à prendre place dans la coprésidence paritaire d’un parti politique en tant que coprésidente du DTP [Parti de la Société démocratique dissout en 2009]. »
La demande de justice pour Aysel Tugluk signifie donc la défense du mouvement des femmes, de la politique et de la vie démocratique, a déclaré le Conseil des femmes du HDP. Et de conclure : « Nous exigeons la libération immédiate d’Aysel Tugluk et tenons le ministère de la Justice responsable de la dégradation de son état. Nous lançons un appel à toutes les femmes : défendons une politique de vie contre la politique de mort imposée à Aysel Tugluk et aux autres prisonnières politiques ! »