Le HDP a réagi à l’arrestation, vendredi, de la députée Semra Güzel et dénoncé la campagne de dénigrement médiatique menée contre la politicienne kurde à cette occasion.
Placée en garde à vue vendredi, Semra Güzel, députée du Parti démocratique des Peuples (HDP) a été conduite aujourd’hui au Palais de justice d’Istanbul pour être entendue par le parquet après l’interrogatoire de police. Le HDP proteste contre cette arrestation et dénonce la campagne de diffamation menée par les médias contre la femme politique kurde.
Dans un communiqué publié ce matin, le Conseil des femmes du HDP a déclaré sa solidarité avec Semra Güzel, décrivant celle-ci comme une représentante des femmes et une élue du peuple. « Fidèle à sa tactique consistant à mener des attaques pour détourner l’attention des crises qui touchent la Turquie, l’alliance masculine de l’AKP et du MHP [coalition islamo-nationaliste au pouvoir en Turquie] a identifié Semra Güzel comme une cible », a pointé le conseil des femmes. Au ministre turc de l’intérieur, qui s’est publiquement félicité de l’arrestation de la députée, la qualifiant d’ « opération réussie », le Conseil des femmes a lancé cet appel : « Au lieu d’arrêter des femmes, vous devriez arrêter les meurtriers de femmes. Vous ne pouvez pas dissimuler vos propres crimes en faisant de l’agitation et en alimentant le nationalisme, le racisme, le sexisme et la misogynie. En tant que femmes, nous ne nous plierons pas à cette sale politique. »
De son côté, le bureau exécutif du HDP a souligné dans une déclaration que le gouvernement turc utilisait l’arrestation de Semra Güzel à des fins de propagande : « Contrairement à ce que les autorités veulent faire croire, notre députée n’a pas été arrêté à Edirne, mais à Istanbul. Les informations selon lesquelles elle portait une perruque et avait changé d’apparence ne correspondent pas à la réalité. Jusqu’à aujourd’hui, tous nos amis ont résisté aux attaques de toutes sortes. Ils mènent une lutte courageuse et il n’est pas question pour eux de fuir. Bien sûr, nous ne faisons pas confiance au système judiciaire contrôlé par le gouvernement et nous ne nous attendons pas à ce qu’il prenne une décision indépendante. Cependant, nous sommes un parti qui a fait de la lutte contre la mentalité et l’appareil de l’AKP son principe de base. »
Par ailleurs, le coprésident adjoint du HDP, Tayip Temel, a manifesté son indignation après la publication sur les réseaux sociaux de séquences vidéo montrant la députée menottée dans le dos et entourée de deux policières qui tentent brutalement de lui faire baisser la tête. « La seule préoccupation de ceux qui ont infligé ce traitement ignoble à notre amie Semra Güzel, qui est toujours députée, est de nous faire plier… Elle est menottée dans le dos, on lui tire les cheveux, on essaye de lui faire baisser la tête… Mais vous ne réussirez pas ! », a écrit M. Temel sur son compte twitter.
La procédure à l’encontre de Semra Güzel
L’immunité parlementaire de Semra Güzel a été levée en mars par un vote de l’assemblée nationale. La jeune femme de 38 ans, médecin de formation, est poursuivie pour « trahison » et « appartenance à une organisation terroriste armée ». Le déclenchement de la procédure a été précédé d’une campagne de diffamation vraisemblablement orchestrée par le ministre turc de l’intérieur Suleyman Soylu.
Des photos montrant Güzel avec son ancien fiancé, le guérillero Volkan Bora (Nom de Guerre : Koçero Meletî), ont été le point de départ de cette campagne de dénigrement qualifiée par le HDP de « théâtre de la honte ». Les photos avaient été prises en 2014 lors d’une visite d’une délégation du HDP aux guérilléros du PKK dans le Sud-Kurdistan. La rencontre qui avait l’aval du gouvernement turc se déroulait dans le cadre du processus de paix. Il s’agissait de discuter des moyens à mettre en oeuvre pour parvenir à une désescalade du conflit entre l’Etat turc et le mouvement kurde.
Les photos en question avaient été retrouvées sur le téléphone portable du combattant kurde Volkan Bora qui a perdu la vie en avril 2017 dans un raid aérien de l’armée turque à Adiyaman. Le ministère public turc a attendu plusieurs années avant de les utiliser contre la jeune femme.