Anna Mahjar Barducci, directrice de projet à l’Institut de recherche des médias du Moyen-Orient (MEMRI), publie un remarquable article dans la revue de MEMRI (n° 420) après l’assassinat, le 16 septembre dernier, de Jina Mahsa Aminî qui suscita une indignation mondiale et de nombreuses manifestations dont celle de Rennes Manifestation pour Jina organisée à Rennes par Zîn 35 au cri de « jin, jiyan, azadî » – Amitiés kurdes de Bretagne (akb.bzh)

« Redonnez-lui son nom kurde : Jina Amini : Nous la connaissons tous sous le nom de Mahsa Amini, la jeune fille de 22 ans qui a été torturée et tuée par la « police de la moralité religieuse » de la République islamique d’Iran. Cependant, son nom était Jina, un beau nom kurde, qui signifie « vie ».

En Iran, la population kurde est discriminée et les noms kurdes sont interdits. « L’Iran contrôle la façon dont ses citoyens nomment leurs enfants. L’Iran nie les noms qui ne figurent pas sur sa liste persane et islamique approuvée, les noms qui représentent le nationalisme ethnique ou la fierté régionale sont interdits, à l’exception des noms persans », explique le commentateur kurde Himdad Mustafa… »

Anna Mahjar Barducci poursuit :

« Les militants kurdes des droits de l’homme sur les médias sociaux soulignent que Jina n’a pas seulement été battue à mort parce qu’elle portait son hijab trop lâche et non conforme aux normes du régime, mais aussi parce qu’elle était kurde. L’activiste kurde-suédois, le Dr Kochar Walladbegi, écrit : « En Iran… des minorités comme les Kurdes sont réprimées… Pour les Kurdes, être tués et torturés est un comportement systématique [de la République islamique], ils y sont confrontés tous les jours de leur vie !… Jina a été torturée par la police des mœurs iranienne… aussi parce qu’elle était kurde et femme, ce qui fait d’elle une minorité au sein d’une minorité ! » 

La République islamique accuse les groupes d’opposition kurdes d’aider les manifestants

« Après la mort de Jina, les manifestations contre la République islamique se sont intensifiées dans tout le pays, en particulier dans la région du Kurdistan. Le média kurde Rudaw a rapporté que le gouvernement iranien avait dit aux partis d’opposition kurdes basés aux frontières de la région du Kurdistan d’évacuer leurs bases, sinon le régime envisagera d’autres options. Le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) iranien a inondé le ciel des provinces d’Erbil et de Sulaimani de la région du Kurdistan de missiles balistiques et de drones suicides à la fin du mois dernier, ciblant des bases de groupes d’opposition kurdes, qu’ils accusent de fournir des armes aux manifestants dans le pays, a expliqué Rudaw ». 

« Jin, Jiyan, Azadi »

« Il convient de noter que le slogan en farsi des manifestations ‘Zan, Zendegi, Azadi [Femme, vie, liberté] ‘ est en fait un slogan kurde populaire, utilisé depuis des années dans le mouvement indépendantiste kurde. C’est Abdullah Öcalan, membre fondateur emprisonné du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui a popularisé le slogan dans ses écrits…

En kurde, la racine du mot vie est « Jin ». Jin signifie femme, tandis que jîn signifie vivant et jiyan signifie vie. Le mot racine est le même. Et c’est pourquoi nous disons Jin, Jiyan, Azadi. Azadi signifie liberté. Et étant donné que le mot sumérien pour liberté est Amargi, qui signifie « retour à la mère », les trois mots sont tellement interconnectés et prennent tout leur sens : femmes, vie, liberté. Au fur et à mesure que les femmes deviennent libres, il est inévitable que la vie elle-même revienne à sa magie et à son enchantement. Ainsi, le slogan, Jin, Jiyan, Azadi…

Il est indéniable que les manifestations pour la liberté en Iran ont aussi une racine kurde. Le changement en Iran viendra des femmes et des minorités ethniques qui sont fatiguées d’être opprimées et persécutées. Dans les médias sociaux, de nombreux utilisateurs écrivent : « Dites son nom. » Eh bien, elle s’appelait Jina. N’oublions pas sa mort et n’annulons pas son identité kurde. La lutte « pour la liberté » (« baraye azadi », comme le dit la chanson populaire anti-régime) s’oppose à la discrimination de la République islamique contre les femmes, les minorités et les Kurdes. Jina était à la fois une femme et une Kurde. Son nom Jina trouve sa source dans le slogan pour la liberté, Jin, Jiyan, c’était une femme, elle représente la vie. Dites son nom : Jina Amini ».

Par André Métayer

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André Metayer
André Métayer, a "découvert" les Kurdes en 1994 : "ce fut un véritable choc". Il revint du Kurdistan "Un pays qui n'existe pas mais les Kurdes, eux, existent, je les ai rencontrés" et depuis il ne les a pas quittés. Militant infatigable quand il s'agit de défendre la cause kurde, il a créé il y a plus de vingt ans, la "Délégation rennaise Kurdistan" qui devint les "Amitiés kurdes de Bretagne" dont il reste le "président fondateur". Il a été, lors d'une cérémonie en mai 2010, honoré par le Congrès national du Kurdistan (K.N.K) : "Your solidarity and friendship is our strength. Thank you André Métayer".

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