SADAT recrute et forme des civils qui vont intégrer les forces paramilitaires chargées d’appuyer les opérations militaires contre les kurdes

La société militaire privée SADAT recrute des civils qui sont formés pour intégrer les forces paramilitaires chargées d’appuyer l’armée turque dans les opérations contre les Kurdes.

Au lendemain du coup d’État manqué du 15 juillet 2016, le gouvernement AKP dirigé par Recep Tayyip Erdoğan a entrepris d’intensifier la répression contre les Kurdes. Beaucoup d’associations se présentant comme des organisations de la société civile ont ainsi été chargées d’exécuter les basses œuvres du régime d’Erdogan. Les forces paramilitaires qui patrouillaient dans les rues des métropoles turques avant même le putsch raté, avaient été formées au sein de ces soi-disant associations par la société militaire privée SADAT.  

QU’EST-CE QUE SADAT ?

La société SADAT connue pour avoir livré des armes à l’organisation al-Nosra en Syrie, se définit comme une « société de conseil et de formation militaire dans le domaine de la défense ».

Fondée le 28 février 2012 par 23 officiers à la retraite de l’armée turque, dont le général Adnan Tanriverdi, SADAT fournit des services tels que la formation militaire, le conseil en défense et l’acquisition de munitions dans le domaine international. Les membres fondateurs de la société expliquent avoir choisi le nom de « SADAT » en référence au terme arabe “Sayyid” qui est un titre honorifique désignant les descendants du prophète Mahomet.

SADAT présente sa mission comme étant « d’établir une collaboration en matière de défense et dans le domaine de l’industrie de la défense entre les pays musulmans afin d’aider le monde islamique à prendre la place qui lui revient parmi les superpuissances ».

QUI EST ADNAN TANRIVERDI, FONDATEUR DE SADAT ?

Le général de brigade à la retraite Adnan Tanriverdi, qui a servi pendant près de 30 ans dans le département de guerre spéciale de l’état-major général et dans l’organisation de défense civile de la République turque de Chypre du Nord (RTCN), est le principal fondateur de SADAT. L’un des élèves de Tanriverdi n’est rien moins que le ministre turc de la défense Hulusi Akar. À l’instar de nombreux officiers à l’époque, la carrière du général de brigade avait été interrompue en 1997 par une mise à la retraite en raison de sa proximité avec les milieux islamistes.

Suite à cette retraite forcée, Tanriverdi a rejoint l’Association des défenseurs de la justice (ASDER) fondée par des militaires retraités comme lui. Il est resté à la tête de l’association pendant 5 ans. Plus tard, il a eu l’idée de restructurer les forces armées turques (TSK) par le biais du Centre d’études stratégiques (ASSAM). Avant de fonder SADAT, Tanrıverdi a mené des recherches sur le fonctionnement des sociétés privées américaines de conseil dans le domaine de la stratégie militaire aux États-Unis.

RELATION AVEC ERDOĞAN

Lorsque Erdogan est élu maire d’Istanbul en 1994, Tanriverdi fait partie de ses rares soutiens au sein de l’institution militaire. Depuis cette époque, la relation entre les deux hommes est allée en se renforçant. C’est ainsi qu’en août 2016, l’officier a été nommé conseiller principal d’Erdogan.

Dans un discours prononcé en décembre 2019 lors d’un congrès à Istanbul, Tanriverdi avait déclaré : « nous devons nous préparer à la venue du Mahdi ». Suite aux fortes réactions suscitées par ces propos, l’officier à la retraite a été licencié de son poste de conseiller principal et de membre du comité de sécurité et de politique étrangère en janvier 2020.

LES ACTIVITÉS DE SADAT

L’on sait que Tanriverdi a joué un rôle important dans la répression qui a suivi la tentative de coup d’État du 15 juillet par l’intermédiaire de SADAT, avant d’être nommé conseiller principal du président. Durant la nuit du coup d’Etat, un grand nombre d’armes lourdes a été distribué à des civils sous la direction de SADAT. Niant les faits, Tanriverdi a déclaré : « Pensez-vous qu’une entreprise comptant moins de 10 consultants aurait pu jouer un rôle dans la répression de la tentative de coup d’État ? ». Cependant, Sedat Peker, un chef de la pègre turque bien au fait des relations sales au sein de l’État, a fait des révélations sur les activités de SADAT dans des vidéos postées sur YouTube.

ARMES LIVRÉES À DES GROUPES DJIHADISTES EN SYRIE

En 2014, la presse a révélé que SADAT avait envoyé des camions remplis d’armes à al-Nosra et à l’État islamique. Ces armes ont été utilisées contre les Kurdes dans le nord de la Syrie, notamment à Kobanê, ainsi que dans le Sud-Kurdistan (nord de l’Irak), à Shengal, Kirkouk et Mossoul.

RELATION ENTRE SADAT ET LES ASSOCIATIONS « OCAK »

Une des activités les plus importantes de SADAT consiste à dispenser des formations dans des camps militaires. Selon la législation turque, aucune institution autre que les forces armées turques, les forces de police et la Corporation de l’industrie mécanique et chimique (MKE) n’est autorisée à produire, vendre ou utiliser des armes sur une base institutionnelle. Cependant, la société privée SADAT dispense des formations militaires et vend des armes à l’échelle internationale, au mépris des lois turques.

SADAT aurait ainsi dispensé des formations militaires à un grand nombre de personnes au sein des associations dites « OCAK » établies après 2016. Les recrues auraient pris part aux opérations militaires menées par l’armée turque tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières de la Turquie ? Ces forces paramilitaires ont reçu un titre officiel du gouvernement turc après avoir démontré leur utilité.

ACTIVITÉS DES ASSOCIATIONS OCAK AU KURDISTAN

Selon certaines sources, les associations OCAK ont reçu une formation militaire sur la façon de réagir à une éventuelle guerre civile au Kurdistan et en Turquie. Les personnes travaillant dans les structures basées au Kurdistan ne sont pas seulement recrutées dans les forces paramilitaires ; elles sont aussi chargées de propager la toxicomanie et la prostitution au sein de la population kurde, cela afin de mater dans l’œuf toute velléité d’insurrection. De fait, ces associations qui travaillent main dans la main avec les policiers, les militaires et les protecteurs de villages, forment un vaste réseau criminel dans les régions kurdes.

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