Deux ressortissants turcs ont été condamnés à 5 ans de prison par la justice belge pour tentative d'assassinat contre des dirigeants kurdes
Zekeriya Çelikbilek (à gauche) avec Ismail Hakki Musa, ancien ambassadeur de Turquie en France (au milieu)

Acquittés en première instance, deux ressortissants turcs ont été condamnés en appel à 5 ans de prison en Belgique. Les deux hommes, qui étaient en contact étroit avec les services secrets turcs, avaient participé en 2017 à une tentative d’assassinat contre des personnalités politiques kurdes à Bruxelles.

La cour d’appel de Bruxelles a condamné par contumace deux membres d’un “commando” turc chargé d’assassiner des hommes politiques kurdes à Bruxelles. La tentative d’assassinat qui remonte à 2017 visait deux représentants du Congrès national du Kurdistan (KNK), Remzi Kartal et Zubeyir Aydar, tous deux résidant en Belgique depuis des décennies.

La justice belge a reconnu la culpabilité de Zekeriya Çelikbilek et de Yakup Koç. Le premier, un ressortissant franco-turc, est un ancien officier militaire turc. Le second, de nationalité turque, avait été contrôlé en possession d’une carte d’identité de la police turque. Leur plan était de tirer sur les représentants kurdes à partir d’une moto et de s’enfuir ensuite à bord d’une camionnette. Ils avaient cherché pour cela à acheter des traceurs GPS pour les installer sous la voiture des cibles.

Contacts avec les services de sécurité turcs

Acquittés en première instance, les deux hommes qui ont fui le pays entre temps ont été condamnées à cinq ans de prison par la Cour d’appel de Bruxelles. Selon l’avocat de Kartal et Aydar, Jan Fermon, il est évident que la tentative d’assassinat a été orchestrée sur ordre du gouvernement turc, ce que confirment les détails rapportés par le journal belge De Morgen. Les écoutes montrent que Koç opérait en tant qu’employé des services de renseignement turcs (MIT), rapporte le journal. L’enquêté a révélé en outre que l’individu était anciennement responsable de la sécurité à l’ambassade de Turquie à Paris.

“Une peine très sévère est nécessaire pour protéger la société contre les actions des deux accusés, qui étaient prêts à poursuivre les parties civiles jusque dans le pays où ils avaient obtenu l’asile”, ont estimé les juges. “Les faits témoignent de l’attitude extrêmement dangereuse des accusés”, peut-on encore lire dans le dispositif du jugement.

Cette affaire souligne les menaces à l’encontre de la communauté kurde de Belgique, d’autant plus après l’agression d’une famille kurde revenant de la célébration du Newroz, le nouvel an kurde. Ces derniers jours ont été marqués par une flambée de violence, des bandes de “Loups gris” (ultra-nationalistes turcs) ayant terrorisé des familles kurdes et des personnes âgées à Louvain, en Belgique. Reste à savoir si les nouvelles révélations sur la tentative d’assassinat de 2017 exerceront une pression supplémentaire sur les autorités belges pour les amener à évaluer le potentiel d’action des groupes paramilitaires et des cellules clandestines turques sur le sol européen.

En outre, des éléments de preuve suggèrent des liens potentiels entre le “commando” et un réseau plus large opérant en France. Les auteurs de l’attentat auraient été en contact étroit avec des représentants du Conseil national de sécurité turc et une société militaire privée du nom de Sadat, l’équivalent turc du groupe Wagner.

Les révélations faites en Belgique pourraient ainsi relancer l’instruction dans l’affaire de l’assassinat des trois militantes kurdes à Paris en 2013. Malgré la mort du principal suspect dans cette affaire, un homme du nom d’Ömer Güney qui se revendiquait également des Loups gris, on espère que la justice pourra encore être rendue. Depuis plus de 11 ans, les représentants de la communauté kurde de France exigent des autorités françaises la levée du secret-défense afin que toute la lumière soit faite sur le triple assassinat. En décembre 2022, quelques semaines avant le dixième anniversaire des assassinats de 2013, trois autres militants kurdes ont été tués dans une attaque contre le siège du Conseil démocratique kurde en France (CDK-F) à Paris.

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