L’assassinat à Paris de la militante kurde Fidan Dogan figure en tête des crimes recensés par la campagne « 100 raisons pour juger le dictateur Erdogan » lancée par le Mouvement des Femmes kurdes en Europe (TJK-E) à l’occasion de la journée internationale des violences faites aux femmes, le 25 novembre dernier.
L’objectif de la campagne, telle que présentée par le TJK-E, est de recueillir 100 000 signatures jusqu’au 8 mars, mais aussi de « partager des histoires de femmes assassinées, d’agir et de créer des alliances contre le féminicide et le fascisme. » L’organisation des femmes kurdes se propose ainsi d’être « la voix des femmes assassinées face au dictateur qui ne cesse de commettre des massacres chaque jour. »
Sur le site internet consacré à la campagne, sont recensés 100 des crimes commis par le régime d’Erdogan à l’encontre des femmes. Nous publions ici le second article consacré à l’assassinat de Fidan Dogan, plus connue sous le nom de Rojbîn, exécutée à Paris le 9 janvier 2013, en même temps que ses camarades de lutte Sakine Cansiz, figure de proue du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), et Leyla Saylemez. Ces crimes commandités par les services de renseignement turcs (MIT) demeurent, à ce jour, impunis. Pour dénoncer l’impunité et demander que justice soit faite, le Conseil démocratique kurde en France (CDK-F) a lancé un appel à manifester à l’occasion des huit ans du triple assassinat, le 9 janvier prochain, non seulement dans la capitale, mais aussi dans plusieurs grandes villes de l’hexagone.
Fidan Dogan est née le 17 janvier 1982, dans la région d’Elbistan, au Nord-Kurdistan (Turquie). Elle est arrivée en France à l’âge de 9 ans pour rejoindre ses parents et ses frères et sœurs qui avaient immigré dans le pays quelques années plus tôt. Fidan est sensibilisée à la lutte de libération kurde durant ses années de lycée. Très tôt, elle décide de s’engager au sein des mouvements de la jeunesse kurde en Europe. C’est à cette période qu’elle adopte le prénom de « Rojbîn » qui signifie « apporter le soleil » en kurde.
À partir de 2002, la jeune femme va se consacrer aux activités diplomatiques. Elle représente ainsi le Congrès national du Kurdistan (KNK) en France et devient, à partir de 2011, la responsable du Centre d’Information du Kurdistan (CIK), à Paris.
Le 9 janvier 2013, les militantes kurdes Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Saylemez ont été exécutées d’une balle dans la tête dans les locaux du CIK, au 147 rue La Fayette. L’enquête menée en France a révélé de nombreux indices selon lesquels le meurtrier présumé Ömer Güney, arrêté quelques jours après le crime, avait agi pour le compte des services secrets turcs (MIT), comme le confirme l’acte d’accusation : « De nombreux éléments de la procédure permettent de suspecter l’implication du MIT dans l’instigation et la préparation des assassinats. »
Bien qu’Ömer Güney ait été identifié par les autorités françaises comme la personne recrutée pour appuyer sur la gâchette, il semble qu’aucun effort n’ait été entrepris par la France pour faire la lumière sur l’arrière-plan de ces crimes politiques. Le meurtrier, Ömer Güney, a été déclaré « mort en prison ». Les autorités françaises ont ainsi tenté de dissimuler des assassinats politiques de haut niveau. Cependant, pour un sens de la justice significatif, il ne suffit pas de révéler simplement l’auteur du massacre ; les forces qui ont commandité et planifié ce crime doivent également être identifiées.