Le Collectif Solidarité Kurdistan 13, un groupement d’associations de solidarité avec les Kurdes à Marseille, a lancé récemment une campagne pour le retrait du PKK de la liste des organisations terroristes de l’Union européenne.
Fondé en 1978 et engagé depuis 1984 dans la lutte armée contre l’État turc, le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) a été inscrit par l’Union européenne (UE) sur sa liste des organisations terroristes en 2002, sous la pression de la Turquie. Cette inscription était pour le moins incongrue, puisque, dans les années ayant suivi son arrestation par les services secrets turcs (MIT), au Kenya en 1999, le leader du mouvement kurde, Abdullah Öcalan, avait initié une réorientation du parti l’amenant notamment à centrer ses revendications sur l’autonomie démocratique au sein des frontières existantes au lieu de l’indépendance. Dans le cadre de cette réorientation, le PKK avait par ailleurs multiplié, en vain, les concessions et les cessez-le-feu afin d’engager des négociations avec le régime turc et parvenir à une solution politique à la question kurde.
Dans un appel lancé en mai, le Collectif Solidarité Kurdistan 13 – un groupement d’associations, de partis et de syndicats réunis au sein du département des Bouches du Rhône pour défendre la cause kurde – relève justement les incohérences et contradictions liées à la qualification terroriste du PKK par l’Europe. « La résistance du peuple Kurde nous concerne toutes et tous ; la légalisation du PKK, nous la lui devons », tel est le titre de cette campagne par laquelle le collectif exhorte la France et l’Europe, et plus largement la communauté internationale, à « sanctionner fermement le régime autoritaire turc » et « retirer le PKK de la liste des organisations terroristes ».
Soulignant que le PKK « traverse toutes les strates de la société kurde et porte un projet politique fondé sur les valeurs humanistes qui sont les nôtres », les signataires de l’appel énumèrent les conséquences désastreuses de l’inscription du mouvement kurde sur la liste des organisations terroristes de l’UE. C’est d’abord la légitimation de la politique « génocidaire et expansionniste » de la Turquie, qui se traduit par des milliers de prisonniers politiques, des massacres et des invasions au Rojava (nord de la Syrie) et au Sud-Kurdistan (nord de l’Irak), avec l’appui de groupes djihadistes. C’est aussi le régime d’isolement imposé depuis 22 ans au leader kurde Abdullah Öcalan sur l’île-prison d’Imrali. C’est encore la répression exercée en France et en Europe « contre les réfugiés et les associations kurdes ». Le collectif ne manque pas de dénoncer par ailleurs le rôle de cette politique répressive dans l’exécution à Paris en 2013 des militantes kurdes Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Saylemez.
L’appel relève en outre le double jeu de la communauté internationale, de la France en particulier, qui « s’appuyait sur les forces kurdes dans leur combat sans concession contre l’État Islamique », un combat mené par le PYD (Parti de l’Union Démocratique) et le PKK « au prix d’immenses sacrifices… pour sauver le monde des hordes de Daesh ». Et d’ajouter : « Dans ce double jeu de la Communauté Internationale, le peuple kurde est l’allié que l’on sacrifie à souhait sur l’autel de la diplomatie turque, au gré des ententes politiques, des enjeux économiques et géostratégiques. »
Rappelant l’obligation pour tout État de respecter et faire respecter les Conventions de Genève, les auteurs de la campagne fustigent la complaisance des puissances occidentales à l’égard de la Turquie, y voyant une complicité dans l’« épuration ethnique » pratiquée à l’encontre des Kurdes.
« La question du PKK traverse la Syrie, la Turquie, l’Irak et l’Iran; face à l’obscurantisme et au despotisme, il est l’interlocuteur incontournable pour un retour à la paix et à la stabilité au Proche et Moyen-Orient », conclut le groupe de solidarité avec les Kurdes qui appelle instamment la France et l’Europe à cesser leurs « politiques de complaisance » et « mettre fin à des décennies d’injustice et de souffrance ».
Relayée par la Conseil démocratique kurde en France (CDK-F), cette campagne devrait se décliner, au cours des semaines et mois à venir, en différents événements de solidarité avec les victimes de la qualification terroriste du PKK, à commencer par les journalistes et les milliers d’élus et de politiques kurdes qui croupissent actuellement dans les geôles turques.