Le journal Şûjin vient d’être fermé par un décret-loi publié ce matin dans le journal officiel turc.
Şûjin avait été créé à Diyarbakir en décembre 2016, par un groupe de femmes, suite à la fermeture de Jinha(Agence de Presse des Femmes) par les autorités turques en octobre de la même année. Le mot kurdeŞûjin qui inclut le mot femme (jin) signifie la grosse aiguille de couture. En choisissant ce mot, les fondatrices du journal ont voulu signifier qu’elles ne se tairaient pas et qu’elles continueraient à planter leur aiguille là où il faut pour dénoncer toutes les injusitices et les violences à l’encontre des femmes.
Nous publions ici une traduction partielle du communiqué diffusé par le journal ce matin, suite à l’annonce de la décision de fermeture :
« Dans ce monde qui demande aux femmes de se taire, nous avons élevé la parole et la voix des femmes. S’attaquant au carcan de la ‘femme convenable’ dessiné par l’Etat et les médias turcs en général, notre journal a battu en brèche les médias masculins.
Pour cette raison, nous avons reçu de nombreuses menaces. Notre site web a été piraté à plusieurs reprises. Aujourd’hui, ceux qui ont été ‘piqués par notre Şûjin’ tentent de nous faire taire définitivement.
Şûjin était partout
Partout, dans les villes, les écoles, les maisons, les rues, les métros, les établissements publics et privés, Şûjin a porté la voix des femmes et des enfants victimes de violences. Elle a brisé les murs au sein desquels on tente d’annihiler la volonté des femmes. Elle s’est fait la voix de celles et ceux dont les habitations ont été détruites, de celles et ceux exécutés à Sûr, Cizre, Hasankeyf, Nusaybin.
Şûjin a été à Yüksel Caddesi il y a 290 jours afin de faire entendre la voix de Nuriye Gülmen qui avait commencé une grève de la faim, et de toutes les personnes licenciées qui résistent pour récupérer leur travail.
Elle a porté la voix des détenu(e)s torturé(e)s à Şakran, Van, Tarsus, …, des travailleuses et travailleurs exploités, de la nature détruite.
Nous ne nous tairons pas !
Nous continuerons à écrire sans égard aux commandements masculins. La presse libre ne se taira pas, la presse féminine ne se taira pas.
Nous étions, nous sommes et nous serons…
Pour planter notre aiguille dans la langue des médias !