À l’issue du 12e Congrès du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), tenu du 5 au 7 mai, Salih Muslim, membre du Conseil présidentiel du Parti de l’Union démocratique (PYD), a salué une étape « historique » vers un nouveau chapitre du mouvement kurde.
Dans un entretien accordé à l’agence de presse kurde ANF, il a appelé la Turquie à reconnaître la réalité kurde et à en finir avec un siècle de politiques de négation.
« Le PKK a rempli l’objectif pour lequel il a été fondé »
Selon Salih Muslim, la décision du PKK de dissoudre ses structures organisationnelles et de mettre fin à la lutte armée marque un tournant historique. « Le PKK a été fondé avec un but précis, et ce but a été atteint. L’existence du peuple kurde est aujourd’hui reconnue. Des forces d’autodéfense kurdes ont été constituées, et la Turquie elle-même a fini par reconnaître cette réalité », a-t-il déclaré.
Pour Muslim, le temps est venu de passer à une nouvelle stratégie. « L’étiquette de ‘terroriste’ collée au PKK a été imposée par l’État turc. Cette désignation n’a plus lieu d’être. Le moment est venu pour une transformation politique. Et cette transformation est déjà en cours. »
Le traité de Lausanne, racine du conflit
Revenant sur les racines historiques de la question kurde, Muslim a désigné le Traité de Lausanne de 1923 comme l’origine du déni des droits kurdes. « Avant Lausanne, les Kurdes et les Turcs avaient établi un parlement commun. À Lausanne, les Kurdes ont été écartés, niés. Ce traité a ouvert la voie à un siècle de massacres, de politiques d’assimilation et de déportation. »
Salih Muslim estime que cette politique est à l’origine de la fondation du PKK en 1978 et de l’entrée dans la lutte armée en 1984. « Le peuple kurde, acculé à la soumission, a retrouvé sa dignité grâce à cette résistance. Le PKK a été un outil d’éveil des consciences et de légitime défense. »
Une série d’occasions manquées
Le dirigeant kurde a rappelé les nombreuses tentatives de paix sabotées par les dirigeants turcs au fil des décennies. « En 1993, Turgut Özal avait compris que la question kurde ne pouvait pas être résolue par la violence. Il a été assassiné. En 2007, les Kurdes ont encore tendu la main lors du processus d’Oslo. Mais à chaque fois, c’est l’État qui a bloqué », a-t-il affirmé.
Malgré ces blocages répétés, Salih Muslim estime que le peuple kurde a toujours fait preuve de bonne volonté. « Aujourd’hui, la balle est dans le camp de la Turquie. Il faut mettre fin à l’idéologie du déni. Il faut reconnaître l’identité kurde et construire la coexistence. »
« Le peuple kurde a payé le prix fort »
Pour Salih Muslim, les Kurdes ont consenti d’immenses sacrifices au cours de leur lutte. « Depuis les années 1980, le peuple kurde a payé un lourd tribut. En 2015, une nouvelle campagne d’anéantissement a été lancée. Résultat : la Turquie est ruinée, et les acquis démocratiques sont perdus. »
Selon lui, la paix profiterait à toute la région. « Si l’État turc accepte la réalité kurde, il n’y aura plus de conflit. Cela bénéficierait à tout le Moyen-Orient. »
Un modèle démocratique à protéger
Salih Muslim a conclu en soulignant l’importance du modèle de la nation démocratique : « En Mésopotamie, les peuples ont toujours vécu ensemble. La démocratie ne se construit pas seulement avec des partis, mais avec une culture sociale. La nation démocratique appartient à tous. »
Il a appelé les nouvelles générations à connaître l’histoire du PKK : « Toute organisation qui veut œuvrer pour la liberté et la démocratie doit comprendre le parcours du PKK. Ce mouvement, parti de rien sous la direction d’Abdullah Öcalan, a grandi en gardant foi en ses principes. C’est un héritage précieux pour l’avenir. »