Dans un entretien accordé à l’agence de presse kurde ANF, Pervin Buldan, membre de la délégation d’Imrali, est revenue sur la rencontre avec le président turc Recep Tayyip Erdoğan, considérée comme une étape majeure dans la relance du processus politique.

Elle y souligne que l’Appel pour la paix et une société démocratique, lancé par Abdullah Öcalan le 27 février, est bien plus qu’un appel à la négociation : c’est une invitation à la mobilisation sociale et politique.

Une rencontre jugée « historique »

Pour la première fois, le président turc a accepté de rencontrer officiellement une délégation venue discuter du processus de paix. « Le président a écouté nos propositions, il a pris cette question au sérieux et il s’est montré engagé », rapporte Buldan. Elle affirme avoir ressenti une volonté politique nouvelle du côté de l’exécutif, comparable à celle exprimée par Abdullah Öcalan depuis sa prison.

Vers une nouvelle étape

Si aucun calendrier officiel n’a encore été établi, la délégation estime que des progrès rapides sont possibles. Buldan évoque un objectif de concrétisation d’ici juin, à condition que les étapes législatives et politiques nécessaires soient enclenchées rapidement. La dissolution du PKK pourrait alors être envisagée, sous réserve de l’organisation d’un congrès et de la participation directe d’Abdullah Öcalan au processus.

Un processus encore fragile

Pervin Buldan reste prudente. « Nous avons vécu 2015. Nous savons que des tentatives de sabotage sont toujours possibles. Il faut réduire les risques et éviter les erreurs du passé. » Elle appelle à la responsabilité de tous les acteurs politiques, au-delà du seul DEM Parti : Parlement, partis d’opposition et société civile sont appelés à contribuer à ce processus.

Elle insiste sur le fait que ce n’est pas seulement une question kurde mais une question nationale : « Cela concerne les 85 millions de citoyennes et citoyens de ce pays. »

Pas de paix sans démocratie

Interrogée sur les contradictions entre ce processus et la répression politique persistante (arrestations, nomination de kayyums, condamnation d’Ekrem Imamoğlu), Buldan répond sans détour : « Ce sont des pratiques inacceptables. Nous refusons les tutelles, qu’elles soient à Hakkari ou à Istanbul. »

Elle rappelle que la démocratisation ne doit pas être considérée comme un point d’arrivée, mais comme un combat permanent, à mener sur tous les fronts : droits des femmes, des enfants, des travailleurs, de la presse.

« Un appel à la lutte collective »

Pour Buldan, l’Appel pour la paix et une société démocratique lancé par Abdullah Öcalan ne doit pas être perçu comme une simple démarche institutionnelle. Il constitue un appel à la mobilisation collective, à la construction d’une société fondée sur l’égalité, la justice et la pluralité.

Elle conclut : « Ce processus ne peut aboutir que s’il est porté par la société tout entière. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons construire une paix juste et durable. »

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