Les attaques menées par l’État turc dans le nord et l’est de la Syrie ont coûté la vie à au moins 229 civils entre le 1er janvier et le 15 mars 2025, selon les chiffres fournis par le Comité de la santé de l’Administration autonome et plusieurs organisations locales.
311 autres personnes ont été blessées, souvent grièvement. En l’espace de trois mois, les bombardements aériens, les tirs d’artillerie et les frappes de drones ont transformé la région en zone de guerre permanente.
Les chiffres sont glaçants : rien qu’au mois de janvier, 385 activités de drones, 34 frappes aériennes, 162 tirs d’artillerie et 20 frappes de drones armés ont été recensés. Le mois de février n’a guère été plus calme, et mars a vu une recrudescence des attaques ciblant directement les civils.
« Même la guerre a ses règles. L’État turc les piétine chaque jour », dénonce Mistefa Shex Muslim, juriste et observateur des droits humains.
Familles décimées, enfants visés
L’attaque la plus meurtrière a eu lieu le 17 mars, dans le village de Berxbotan, près de Kobanê. Cette nuit-là, des drones turcs ont visé une habitation familiale. Dix personnes ont été tuées, dont sept enfants âgés de 8 mois à 15 ans. Une seule fillette, âgée de 9 ans, a survécu, grièvement blessée.
Quelques semaines plus tôt, le 11 janvier, un raid aérien sur le village de Mesreb (canton de l’Euphrate) avait coûté la vie à un père et ses deux filles. D’autres membres de la même famille, dont un bébé de 1 an, ont été blessés.
Les témoignages recueillis sur le terrain décrivent une stratégie visant à briser la société civile et à saboter le projet d’Administration autonome mis en place dans le nord-est syrien.
« L’État turc veut semer le chaos pour empêcher toute forme d’organisation démocratique locale. Il cible les familles, les infrastructures, les marchés, les écoles », explique Yusif Kute, basé à Qamishlo.
Malgré l’ampleur des violences, la communauté internationale reste silencieuse. Les défenseurs des droits humains dénoncent un deux poids, deux mesures flagrant.
« Pourquoi le monde s’indigne pour Gaza mais pas pour Kobanê ? Les massacres sont les mêmes, seule la géographie change », déplore Mistefa Shex Muslim.
Une population debout malgré tout
À Afrin, Suzan Oso témoigne de la résilience des habitants :
« Ils veulent détruire notre espoir, mais nous restons debout. Malgré les massacres, notre peuple résiste. Nous serons dans les rues chaque jour, pour nos enfants, pour notre avenir. »
Face à ces crimes de guerre présumés, aucune sanction internationale n’a été prononcée contre l’État turc. Ni les Nations Unies, ni l’Union européenne, ni même les grands médias ne semblent vouloir s’emparer de la question.
Mais sur place, dans les villages bombardés et les hôpitaux débordés, la réalité ne peut plus être ignorée. Les civils paient le prix fort, sous les frappes, dans le silence du monde.