La conférence de l’EUTCC s’est achevée par l’adoption d’une résolution contenant des revendications pour résoudre la question kurde
Conférence de l'EUTCC au parlement européen les 8 et 9 mars 2023

À l’issue de deux jours de discussions au Parlement européen à Bruxelles, la conférence de l’EUTCC s’est achevée par l’adoption d’une résolution contenant des revendications pour une solution à la question kurde.

Les 8 et 9 mars, la Commission civique UE-Turquie (EUTCC) a organisé sa 17e conférence annuelle, en coopération avec l’Institut kurde de Bruxelles, ainsi qu’avec plusieurs groupes politiques du parlement européen (le Groupe de gauche, les Verts/Alliance libre européenne et les groupes de l’Alliance libre des socialistes et démocrates). La conférence intitulée « L’Union européenne, la Turquie, le Moyen-Orient et les Kurdes » s’est tenue au Parlement européen à Bruxelles, sous le patronage de l’archevêque sud-africain et prix Nobel de la paix Desmond Tutu, de l’avocate iranienne et prix Nobel de la paix Shirin Ebadi, de l’ambassadrice de bonne volonté du Conseil de l’Europe Bianca Jagger, du linguiste et philosophe Noam Chomsky et de la politicienne kurde Leyla Zana, lauréate du prix Sakharov du Parlement européen pour la liberté de l’esprit.

À l’issue de la conférence de deux jours, une résolution contenant des revendications pour la résolution de la question kurde a été adoptée jeudi soir.

Hommage aux victimes du tremblement de terre

La résolution commence par un hommage aux victimes du tremblement de terre dévastateur qui a « secoué la Turquie, le Kurdistan et la Syrie », notant que des dizaines de milliers de personnes ont perdu la vie et que des villes entières sont en ruine. « L’ampleur de la violence, estime cependant la conférence, n’est pas seulement le résultat de la tectonique des plaques, mais aussi de l’appât du gain associé à la politique moniste de l’État. »

Pour ne pas aggraver la catastrophe humanitaire, la conférence invite la Turquie « à cesser immédiatement ses attaques sur le nord de la Syrie et à lever le blocus sur l’aide humanitaire apportée par les volontaires. »

Cessez-le-feu bilatéral

Le cessez-le-feu proclamé par le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) suite au tremblement de terre devrait devenir bilatéral, recommande la résolution, ajoutant que cela représente « une opportunité pour les 100 ans de la République de Turquie de surmonter la mentalité d’État moniste et de devenir une république démocratique ». 

Agir en Europe contre l’interdiction du HDP

La conférence de l’EUTCC appelle l’opposition à s’unir pour la démocratie et la paix et à se mobiliser ensemble contre l’interdiction du Parti démocratique des peuples (HDP). « La communauté internationale, en particulier l’Union européenne et le Conseil de l’Europe, doit envoyer des signaux clairs indiquant qu’elle n’acceptera en aucun cas l’interdiction du deuxième plus grand parti d’opposition. »

Appel à la libération d’Öcalan et à la reprise des négociations entre la Turquie et le PKK

La résolution dénonce par ailleurs l’isolement carcéral d’Abdullah Öcalan: « L’ouverture des portes de la prison d’Imrali, qui, en tant qu’espace de non-droit, est le point de départ des violations les plus massives des droits de l’homme dans les prisons turques, est une nécessité historique qui n’a que trop tardé. L’Union européenne, le Conseil de l’Europe et en particulier le CPT sont appelés à mettre en oeuvre tous les mécanismes pour faire cessez l’arbitraire qui règne à Imrali et pour permettre aux avocats d’accéder librement à l’île. » La conférence de l’EUTCC demande en outre la libération d’Abdullah Öcalan et la reprise du dialogue entre l’Etat turc et le PKK pour une solution durable.

Reconnaissance de l’AANES par la communauté internationale

« L’Administration autonome du nord et de l’est de la Syrie (AANES), dont le contrat social repose sur le concept d’autonomie démocratique, est la seule alternative pour un Moyen-Orient démocratique et pluraliste. De cette manière, les lignes de conflit à connotation ethnique et confessionnelle, ainsi que les crimes de guerre – écocide, génocide, féminicide, violation du droit international – peuvent être stoppés et surmontés », déclare la conférence qui considère que la reconnaissance de l’AANES par la communauté internationale serait une étape importante. À cet égard, la conférence de l’EUTCC attire également l’attention sur l’obligation des États de rapatrier et de juger leurs ressortissants membres de l’État islamique détenus dans les régions du nord et de l’est de la Syrie, tout en soulignant la nécessité de mettre en place un tribunal sur le terrain.

Les attaques de drones doivent être stoppées

« L’effet déstabilisateur de la politique étrangère du gouvernement turc actuel empêche également le développement de la stabilité et de la sécurité dans la région du Kurdistan irakien. L’assassinat de politiciens kurdes, en particulier de femmes, par des drones turcs dans la région du Kurdistan irakien et dans l’administration autonome du nord et de l’est de la Syrie doit être jugé », poursuit la résolution.

Génocide contre les Yézidis

Notant que « de nombreux États ont reconnu politiquement les attaques contre les Yézidis à Sinjar comme un génocide », la conférence appelle l’UE à mettre en oeuvre tous ses mécanismes diplomatiques et politiques pour empêcher d’autres attaques de drones turcs contre les Yézidis.

Enquête internationale sur l’utilisation d’armes chimiques

La conférence de l’EUTCC appelle les Nations unies, l’OIAC et la Cour pénale internationale à se pencher sur les crimes de guerre commis par la Turquie et à lancer des enquêtes indépendantes, particulièrement sur les allégations d’utilisation d’armes chimiques par la Turquie.

Retrait du PKK de la liste des organisations terroristes

Rappelant que « l’Europe a également une responsabilité dans le cadre du Traité de Lausanne signé il y a 100 ans », la conférence appelle « l’UE, les institutions et les Etats européens à prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher une guerre anti-kurde sur le sol européen. Pour ce faire, l’attentat du 23 décembre 2022 à Paris doit être élucidé, souligne la résolution qui insiste également sur la nécessité pour l’UE de retirer le PKK de sa liste des organisations terroristes, afin de contribuer à une solution politique de la question kurde.

Jin Jiyan Azadî

« Toutes ces revendications, conclut la résolution, se trouvent dans le slogan Jin-Jiyan-Azadi (Femme-Vie-Liberté), qui s’est répandu dans le monde entier avec les protestations iraniennes. La conférence EUTCC est solidaire du peuple iranien qui se révolte contre le régime meurtrier. Il ne peut y avoir d’alternative que si la diversité du pays peut participer pleinement aux processus de restructuration politique. L’EUTCC appelle la communauté internationale à faire de ce slogan la maxime de sa politique dans son origine, sans interprétations. »

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