L'appel d'Abdullah Öcalan pour "la paix et une société démocratique", annoncé le 27 février par la délégation d'Imrali, a trouvé un large écho au-delà de la Turquie et du Kurdistan.
Idris Baluken, ancien député du HDP

L’appel d’Abdullah Öcalan en faveur de « la paix et d’une société démocratique », annoncé le 27 février par la délégation d’Imrali, a résonné bien au-delà de la Turquie et du Kurdistan, trouvant un écho au Moyen-Orient et à l’international.

Pour analyser cette démarche historique, l’agence de presse Firat News (ANF) a interviewé Idris Baluken, ancien membre de la délégation d’Imrali et figure politique kurde.

Une démarche ancrée dans l’histoire

Après 26 ans d’incarcération, Abdullah Öcalan replace la lutte du peuple kurde pour la démocratie, la paix et la liberté au cœur des enjeux politiques régionaux et mondiaux. Rappelons qu’en 1999, Öcalan était victime d’une conspiration internationale qui l’a conduit à son arrestation au Kenya. Depuis, il est soumis à un régime d’isolement extrême sur l’île-prison d’Imrali. Malgré ces conditions, il a su maintenir et développer une pensée axée sur la liberté, la démocratie et la paix.

Selon Idris Baluken, cet appel marque un tournant historique. « Ce message puissant réveille l’espoir d’une transformation démocratique et d’un avenir libre, non seulement pour les Kurdes, mais aussi pour l’ensemble des peuples de Turquie et du Moyen-Orient », affirme-t-il.

Une proposition à long terme

Alors que le Moyen-Orient traverse une période de recomposition, Öcalan ne se contente pas de réagir à la situation actuelle. « Sa vision intègre une réflexion sur les cinquante, voire cent prochaines années », explique Baluken. Si les parties prenantes acceptent son initiative, des avancées significatives pourraient émerger à court terme. « Tout dépendra de la réponse que l’État turc choisira d’apporter « , ajoute-t-il.

Retour sur l’échec des négociations passées

Baluken rappelle que les négociations menées il y a une dizaine d’années avaient été interrompues par l’attitude de l’État turc. « Cette rupture a entraîné une période extrêmement difficile, marquée par de lourdes pertes humaines et une pression intense sur la société », déplore-t-il.

Depuis, la Turquie s’est enlisée dans une crise politique, juridique et économique sans précédent. « Si l’accord de Dolmabahçe de 2015 avait été mis en œuvre, le pays ne connaîtrait pas l’effondrement actuel, et les Kurdes n’auraient pas eu à endurer tant de souffrances », estime l’ex-membre de la délégation d’Imrali.

Un besoin urgent de solution

L’actualité au Moyen-Orient, de la Palestine au Liban en passant par la Syrie, a renforcé l’urgence de régler la question kurde. « Nous sommes arrivés à un point de rupture où la résolution de cette question n’est plus un choix, mais une nécessité », affirme Baluken.

Dans ce contexte, l’appel d’Öcalan est perçu comme une occasion historique de relancer un processus de paix. « L’État et le gouvernement turcs doivent maintenant prendre des mesures concrètes et sincères en réponse à cette démarche », insiste Baluken.

Une médiation démocratique indispensable

L’un des points centraux de l’appel d’Öcalan concerne la nécessité d’un cadre légal et démocratique pour permettre un abandon des armes par le PKK. « Le message d’Öcalan est clair : la fin de la lutte armée ne peut advenir qu’avec des garanties institutionnelles », souligne Baluken.

Pourtant, malgré ces ouvertures, des contradictions persistent du côté turc. « Nous voyons des gestes politiques qui ne sont pas suivis d’actions concrètes. L’isolement d’Öcalan reste total, et aucune réforme n’a été engagée en faveur de la démocratisation », critique l’ex-délégué d’Imrali.

« Les Kurdes ne perdront pas avec Öcalan à la table des négociations »

Malgré les obstacles, Abdullah Öcalan continue d’œuvrer pour un avenir pacifique et démocratique. « Il cherche à assurer non seulement les prochaines décennies des Kurdes, mais aussi celles de tous les peuples du Moyen-Orient », souligne Baluken.

Selon lui, l’avenir du processus repose sur la volonté politique de l’État turc. « Si aucune marge n’est laissée à la politique démocratique, si aucun pas juridique n’est fait, alors ce processus n’aura aucune chance d’aboutir », prévient-il.

Quoi qu’il en soit, la confiance des Kurdes en Öcalan reste intacte. « Après 26 ans de détention, il continue d’inspirer son peuple. Il a su redonner une identité politique à ceux dont la langue et la culture avaient été niées. C’est une certitude : avec lui à la table des négociations, les Kurdes ne perdront pas », conclut Idris Baluken.

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