Des combattants des unités paramilitaires du Hachd al-Chaabi, soutien des forces irakiennes, sur la citadelle ottomane de la ville de Tal Afar en Irak, le 27 août 2017-AFP / AHMAD AL-RUBAYE

Dans chaque quartier repris, la scène se répète: les forces irakiennes se pressent pour arracher le drapeau du groupe Etat islamique. Mais au pied de la citadelle de Tal Afar, très endommagée par les explosifs des jihadistes, elle prend un sens tout particulier.

En 2003, après l’invasion américaine et la chute de Saddam Hussein, la mairie et sa police municipale installaient leurs quartiers dans la citadelle ottomane qui faisait la réputation de Tal Afar. Deux ans plus tard, elle devenait une base des forces américaines, qui, aux côtés des forces irakiennes, se lançaient dans une autre bataille contre des jihadistes: ceux d’al-Qaïda.

Face à tous ces événements, la citadelle était restée intacte, perchée en hauteur sur sa colline. Mais lors d’une offensive fulgurante en 2014, les hommes du groupe Etat islamique (EI) s’emparaient de près d’un tiers de l’Irak et de larges pans de la Syrie voisine.

Et à Tal Afar, ils avaient fait détoner des explosifs au pied de la citadelle, endommageant ses murs nord et ouest et provoquant l’alarme de l’Unesco.

‘Choc et tristesse’

La citadelle a ensuite gagné une triste réputation. Elle est devenue une prison de l’EI, où étaient enchaînés des hommes et des femmes des environs dont le comportement ou la résistance étaient déclarés des « péchés » par l’EI.

« En reprenant la citadelle, on a découvert des chaînes et des entraves que les gens de l’EI obligeaient leurs prisonniers à porter », rapporte à l’AFP Abdel Hamid al-Attar, un combattant des unités paramilitaires du Hachd al-Chaabi.

Pour cet Irakien de 49 ans reprendre la citadelle a été un moment fort mais aussi douloureux. « C’est un des piliers de la civilisation », dit-il. « Cette citadelle est un monument historique majeur pour tous les Irakiens, tous les Arabes », assure-t-il. « J’ai ressenti un choc et de la tristesse quand j’ai vu les dégâts laissés par l’EI ».

Non loin de là, trône la Grande mosquée. Des membres du Hachd sont postés au sommet de son haut et fin minaret de sept étages endommagé par les combats. A mi-hauteur, un drapeau flotte au vent, celui d’une des factions du Hachd.

De leur poste, ils peuvent observer l’étendue des dégâts. Sur la place qui s’étend à leurs pieds, un énorme cratère béant, large de plusieurs mètres, témoigne de la force des frappes, aériennes et de l’artillerie. Aux alentours, des poteaux électriques ont été arrachés, des maisons et des magasins soufflés par des explosions.

Où qu’on tourne le regard, aucun signe de vie n’est visible. Seules des inscriptions sur les murs « Propriété de l’Etat islamique », « Dieu est le plus grand » témoignent que des combattants vivaient encore ici il y a peu. Les civils, eux, sont déjà partis, avant même l’entrée des troupes dans la ville.

Aujourd’hui, les jihadistes du « califat » se sont retranchés dans le nord, à al-Ayadieh, où les forces irakiennes mènent leur dernier combat avant l’annonce de la victoire, la dernière qui se fait attendre dans la province septentrionale de Ninive, où Mossoul a été reprise début juillet.

Photographie et baignade

Dans le quartier de la citadelle, leur drapeau noir, renversé pour que ses inscriptions en lettres blanches ne soient plus lisibles, est désormais dans les mains des combattants des forces irakiennes.

Rassemblé autour du drapeau, un petit groupe prend la pose. Devant eux, un combattant qui se fait appeler Abou Abbas sort son téléphone pour prendre, dit-il, « le selfie de la victoire ».

Détournant le slogan du groupe jihadiste sunnite, « L’Etat islamique restera et se maintiendra », cet Irakien originaire de Kerbala, ville sainte chiite du sud du pays, lance, goguenard, au journaliste de l’AFP: « ils vont rester et se maintenir? Mais ils sont où là? Moi, je ne les vois pas! ».

Un peu plus loin, des maisons apparaissent en bon état, mais personne n’ose y entrer, de peur qu’elles n’aient été piégées par les jihadistes.

Au détour d’un quartier, une source d’eau fraîche s’offre aux combattants, harassés par la chaleur brûlante et plus d’une semaine de combats dans la poussière. Certains s’y baignent, d’autres en profitent pour faire une toilette rapide.

Soudain, l’un d’eux est pris d’un doute: « les amis, vous croyez que les jihadistes peuvent piéger l’eau? ».

Source : AFP

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