Commentant la visite récente du Premier ministre irakien Mustafa Al-Kadhimi en Turquie, l’universitaire et homme politique kurde Kamuran Berwari a averti qu’en l’absence de réaction du Gouvernement régional du Kurdistan (Irak), la région autonome serait occupée.
Dr. Kamuran Berwarî, universitaire et homme politique éminent du Sud-Kurdistan (Irak).

Commentant la visite récente du Premier ministre irakien Mustafa Al-Kadhimi en Turquie, l’universitaire et homme politique kurde Kamuran Berwari a averti qu’en l’absence de réaction du Gouvernement régional du Kurdistan (Irak), la région autonome serait occupée. 

Kamuran Berwari est membre du Congrès national du Kurdistan (KNK) et co-président du Front populaire démocratique au Sud-Kurdistan. Il est par ailleurs professeur à l’Université de Dohuk. Dans un entretien avec l’agence de presse kurde Firat News, il a fait part de ses réflexions concernant la visite récente du Premier ministre irakien Mustafa Al-Kadhimi en Turquie.

Le professeur Berwari a déclaré que la raison de la visite de M. Al-Kadhimi à Ankara était de demander un soutien matériel et moral : “Je pense qu’il y a une négociation entre les deux pays sur ce qui peut être fait pour un soutien politique et économique à l’Irak. L’État irakien est dans une situation difficile ; les protestations peuvent s’étendre à l’ensemble de l’Irak en raison du mécontentement populaire, et il est très probable qu’une guerre souhaitée par les puissances internationales aura lieu en Irak. Pour ces raisons, le peuple irakien n’a pas confiance dans son propre État”.

QU’EST-CE QUI A ÉTÉ DISCUTÉ ?

M. Berwari a souligné que des discussions bilatérales avaient lieu entre la Turquie et l’Irak, ajoutant qu’elles pouvaient aussi être trilatérales, avec la participation de l’Iran :

“On sait que ces négociations et ces accords vont constamment à l’encontre des acquis du peuple du Kurdistan. Cependant, cette fois-ci, la réunion a été faite pour débattre de plusieurs questions, dont certaines ont déjà été reflétées dans la presse. L’un des sujets de la réunion était l’administration de Shengal. Les autres sujets étaient le PKK, la question de l’eau, l’ouverture de nouveaux poste-frontières et la recherche de nouveaux moyens de dominer le Rojava et le Bashûr (Sud-Kurdistan), ce qui veut dire réduire l’influence du gouvernement régional (KRG). On suppose aussi qu’il a été question de l’échange de pétrole, du règlement de la question des visas entre les deux États et des accords commerciaux avec les entreprises turques, sous prétexte de reconstruction de l’Irak. Il n’est pas clair si un accord a été conclu sur ces questions. Il n’y a pas d’accord en apparence.”

“Cette rencontre ne va rien amener de bon ; la Turquie veut utiliser l’Irak comme une arrière-cour pour ses propres intérêts”, a ajouté l’homme politique, avertissant qu'”un processus troublé attend l’Irak, étant donné que l’administration Kadhimi est une administration à court terme et que l’Irak n’a pas l’autorité de signer des accords sur le plan stratégique.”

M. Berwari a souligné par ailleurs que la valeur du dollar avait subitement augmenté par rapport à la monnaie irakienne, suite à la visite du Premier ministre irakien Mustafa Al-Kadhimi en Turquie :

“Cela a également un lien direct avec l’économie irakienne. Les forces internationales ont fait s’effondrer les monnaies de l’Iran, de la Turquie et de la Syrie et elles veulent maintenant faire pression sur la monnaie irakienne. La situation économique va se détériorer. Des États tels que la Grande-Bretagne, la France, l’Italie, l’Allemagne, Israël et les États-Unis qui cherchent à dominer l’Irak ne veulent pas que la Turquie et l’Iran aient leur mot à dire sur les sources de richesse en Irak et ils feront tout pour empêcher cela. Les États-Unis en particulier ne laisseront pas la Turquie et l’Iran profiter des opportunités découlant des conflits.

PAS DE BONS RÉSULTATS POUR LES KURDES

L’universitaire a souligné que les négociations entre la Turquie et l’Irak ne produiraient jamais de bons résultats pour les Kurdes et que la dernière rencontre pourrait conduire à une situation difficile pour le PDK (Parti démocratique du Kurdistan, dominé par le clan Barzani, au pouvoir au Sud-Kurdistan) en raison des tentatives de fermer le poste-frontière d’Ibrahim Khalil (principal point de passage entre la Turquie et la région autonome du Kurdistan d’Irak, aussi appelé Khabur). M. Berwari a expliqué que la fermeture de cette frontière pourrait porter un coup majeur au commerce entre la Turquie et le Sud-Kurdistan :

“Il faut le dire clairement, l’Etat turc veut envahir le Bashûr. Il a encerclé le Bashûr en termes politiques, économiques, militaires. Il n’est pas seulement question d’occuper Shengal et le Rojava, mais tout le Kurdistan dans tous les sens du terme. Chaque État peut avoir des exigences ou des menaces concernant l’administration du Sud-Kurdistan, mais cela ne signifie pas que l’administration de Bashûr doit se soumettre à toutes les exigences ou menaces, c’est-à-dire qu’elle doit contre-réagir. L’objectif de tous est clair : envahir le Sud-Kurdistan. S’il n’y a pas d’opposition, de réaction, ils atteindront ces objectifs. Tous les gains seront alors perdus et le sort des Kurdes et du Kurdistan sera entre les mains de ces États ou de ces puissances, comme par le passé.”

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