Simon Dubbins, directeur pour UNITE (the Union) au Royaume-Uni.

6-7/12/2017 – INTERVENTION AU PARLEMENT EUROPEEN

Que fait le mouvement des travailleurs britanniques pour le mouvement kurde en général et pour la libération d’Abdullah Öcalan en particulier ? Nous avons fait du progrès ces dernières années mais il reste un long chemin à parcourir. Nous avons obtenu que notre Confédération syndicale prenne position pour le soutien à la libération d’Öcalan, que les plus grands syndicats dans le pays signe cette pétition. Avoir mis en place une structure pour organiser des meetings dans le Labour Party et au sein de notre Confédération pour convaincre les sections locales est un grand progrès. Cela ne va pas aussi vite que ce que nous aurions voulons, mais le message est en train de passer, malgré toutes les difficultés.

Nés solidaires

Le point de départ de tous les syndicats, au moins l’aile progressiste et ses partis politiques alliés, est simple : nous sommes nés solidaires et nés de la lutte. Je suis très fier que le mouvement des travailleurs britanniques soit un moteur dans les grandes campagnes internationales. Nous avons toujours été aux côtés de nos confrères sud-africains dans la lutte contre l’apartheid. Nous avons été solidaires avec le gouvernement cubain malgré les 50 ans de blocus et les tentatives de le détruire. Nous faisons un très grand effort de solidarité avec nos frères et soeurs en Colombie malgré les meurtres et attaques génocidaires de la part de paramilitaires et du gouvernement colombien, scandaleusement soutenu par les gouvernements britannique et nord-américain. La Palestine aussi est un axe de solidarité important. C’est de là que nous venons.

Nous voulons montrer notre solidarité absolue avec la lutte des Kurdes et avec toutes les forces politiques progressistes en Turquie et dans la région. Nous essayons d’obtenir de nos membres du syndicat plus qu’une simple solidarité. La résistance politique kurde est importante, pas seulement pour les gens qui vivent dans ces pays – la Turquie, Irak, l’Iran, la Syrie -, c’est important pour tout ceux qui vivent dans cette région. Il est important de le comprendre et de le mettre dans son contexte. On parle d’une région où il y a beaucoup de répressions avec une domination masculine. Et au milieu de cette région, nous avons un mouvement politique qui défie tout cela et le bouleverse totalement. Chacun(e) dans le mouvement ouvrier progressistes qui ne voit pas l’importance de ce qui se passe au Rojava, de ce qui se passe avec tout le projet politique que les Kurdes appliquent en ce moment, rate quelque chose d’une importance historique.

Nous avons un mouvement politique qui représente les mêmes valeurs que ce que défend le mouvement des travailleurs du Kurdistan. Ils défendent les droits des femmes, pas seulement en déclarations ronflantes, mais en mettant en pratique l’égalité, la tolérance, l’intégration, la justice sociale. Ce sont les mêmes valeurs que défendent nos syndicats.

Synchroniser les luttes

La montée du nationalisme – et je vois Brexit comme un projet de droite nationaliste – on le voit partout aujourd’hui, que ce soit en Autriche avec les récentes élections, en Allemagne ou encore avec l’élection de Trump. La résistance des Kurdes est absolument essentielle pour la lutte globale, comme le sont nos actions syndicales. Nous devons absolument faire le lien entre tous ces mouvements de lutte et mieux les synchroniser et harmoniser.

Au niveau idéologique, le projet du mouvement politique kurde et l’idéologie d’Öcalan sont fantastiques pour la gauche à plusieurs égards. Sans exagérer, je crois que depuis l’effondrement de l’Union soviétique, la gauche s’est trouvée un peu mise à nue. Nous avons galéré pour trouver un chemin, aller de l’avant. La contribution d’Öcalan et ses analyses nous ont libéré quelque part et nous ont donné un chemin à suivre. C’est excitant. L’attitude envers l’Etat est intéressant. Nous avons l’habitude de reprendre Lénine : le droit des nations à l’autodétermination dans un Etat-nation. La perspective d’un fédéralisme démocratique nous fait dépasser cela. Est-ce possible d’avoir une société sans Etat ? Honnêtement, cela pose problème. Comment réagir contre des multinationales par exemple ? Des centaines de milliers de nos membres syndiqués travaillent dans des multinationales, on a donc besoin de structures transnationales pour contrôler un peu les multinationales. Ce sont des débats qu’il faut mener.

Faire adopter des motions au syndicat

Je crois qu’Abdullah Öcalan est un grand penseur politique. Je vous conseille de le lire. Ce que nous devons faire est de construire une solidarité concrète et efficace. Il y a du travail à faire. Que chaque travailleur syndicaliste devrait faire adopter par sa section syndicale une motion demandant la libération d’Öcalan. De l’autre côté, la communauté kurde devrait s’impliquer plus dans nos syndicats. Je suis absolument certain que nous puissions réussir. Quand dans le passé certains disaient “les cinq de Cuba ne seront jamais libérés (aux Etats-Unis), Nelson Mandela ne sera jamais libéré, l’apartheid ne cessera jamais, il n’y aura jamais de changement en Colombie”, nous l’avons quand même réussi. Il faut que l’on garde la tête haute, que l’on continue la solidarité avec nos frères et soeurs kurdes. Il faut continuer à changer le monde et faire en sorte qu’il soit meilleur.

*Simon Dubbins est directeur pour UNITE the Union au Royaume-Uni. Unite est un grand syndicat au Royaume-Uni avec 1,4 million de membres.

Transcription et correction : Chris Den Hond, Azad Kurkut et Tijda.

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